En plein milieu du mois de juillet les new-yorkais d’Oneida ont sorti Expensive Air, l’album de l’été, plein de douces mélodies et de refrains entrainants, parasols et huiles solaires….noooon, je déconne, ils ont bien pondu un titre comme La Plage, mais rien à voir avec le sable chaud et le coucher de soleil à l’horizon. Là, c’est du brut, on ne se baigne pas, on plonge, on se noie, la mer, on y va en descente en rappel et vol plané pour s’écraser comme une vieille crêpe sur une plage anthracite.
Kid Millions, Bobby Matador, Hanoi Jane, Barry London et Shahin Motia, ces joyeux pitres, nous ont déjà fait le coup, The Wedding en 2005, le gâteau de mariage coupé à la hache, Happy New Year, l’année suivante comme un réveillon en enfer, jusqu’à Romance, un Titanic revisité par John Carpenter !
Ca fait 27 ans que ça dure, 15 albums et ça ne devrait pas s’arrêter avant longtemps tant Expensive Air se place dans le haut de la pile, déjà stratosphérique de la discographie d’Oneida.
Leur disque précédent, sorti en 2022, pouvait bien s’appeler Success, Oneida est toujours resté en marge, préférant les chemins de traverse que les autoroutes pavées d’or, s’aventurant régulièrement en solo ou sur des projets parallèles comme Soldiers Of Fortune ou People Of The North, Ex-Models ou Knyfe Hits.
Ils ont joué avec tout le monde, de Spiritualized à Godspeed You Black Emperor, de Portishead à Yo La Tengo, L’aventure commence très noise rock, avec A Place Called El Shaddai’s en 1997 puis et surtout Enemy Hogs, leur premier grand disque. Ils traversent les années 2000 à vitesse grand V, enchaînant les disques, qui peu à peu intègrent des bouts de rock psychédélique voire de hard rock, Anthem Of The Moon, Each One Teach One, Secret Wars, train d’enfer, pas un seul dérapage, chaque album est une bombe mais on a encore rien vu.
Preteen Weaponry l’annonce en 2008, Oneida se goinfre de krautrock et de drone, étend ses morceaux jusqu’à plus soif, de plus en plus expérimentaux tout en restant accessibles jusqu’à l’extraordinaire et massive doublette Rated O/Absolute II. La décennie suivante sera plus calme mais tout aussi passionnante, concentrée sur des collaborations avec des artistes comme Rhys Chatham. L’imposant Romance remet le couvert en 2018, avant que Success puis Expensive Air relancent le groupe , synthétisant tous les styles absorbés par le groupe de Brooklyn depuis ses débuts.
Expensive Air pousse même le bouchon encore plus loin, avec en particulier Reason To Hide, a parfaite introduction, ses quatre minutes instrumentales et infernales, synthés et guitares hard rock, l’hypnose commence jusqu’au chant puissant de Kid Millions, obligé de pousser ses cordes vocales jusqu’à la limite pour surnager le raffut de ses copains et de sa propre batterie. « Looks Like A Mess » braille-t-il, oui, on confirme mais aucune raison de se cacher.
Au contraire, Oneida peut être fier de nous balancer ensuite deux bombes noise punk-rock comme Spill ou l’hilarant La Plage, avec son petit clin d’œil au fameux Ca Plane Pour Moi de Plastic Bertrand !
La mélodie de Stranger se révèle délicieuse et entêtante dès lors qu’on réussit à encaisser le vacarme, la batterie parfaite en rouleau compresseur, car en effet, Oneida est capable d’écrire des pop songs juste parfaites comme Here It Comes, on n’ira pas jusqu’à dire que ça mériterait d’être un tube interplanétaire, mais pourtant, dans un monde idéal…
Oneida a beau être un groupe génial, écoutez donc Salt par exemple, capable de faire penser à The Fall ou Sonic Youth, Can ou Dead C, il restera toujours à part, faisant le bonheur de quelques happy fews, se glissant ainsi dans la trace de quelques groupes trop peu connus comme Swell Maps dont il reprennent ici superbement et fidèlement le Gunboats.
Avec pour seul défaut d’être un poil trop court, Expensive Air est encore un grand, grand disque d’Oneida, génial groupe mais ça je vous l’ai déjà dit !
Oneida · Expensive Air
Joyful Noise Recordings/Modulor – 19 juillet 2024