[mks_dropcap style= »letter » size= »75″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#6D8982″]C’[/mks_dropcap]est un étrange premier roman qu’a écrit Guillaume Lavenant. Protocole Gouvernante est édité par les éditions Rivages. On sent d’ailleurs une proximité avec Céline Minard, figure désormais incontournable de cette maison. La forme est radicale mais assez simple à décrire. Il s’agit d’un protocole à l’usage d’une gouvernante, comme son titre l’indique. La gouvernante que le texte vouvoie arrive dans une famille aisée. Elle y tisse des liens selon une méthode rigoureuse. Le mari la convoite et la femme voit en elle une alliée. La petite fille dont elle doit s’occuper lui donne toute sa confiance. Il n’y a que l’aîné de la famille, adolescent gâté, qui se pose des questions.
Nous en sommes là lorsque la machine déraille. La fonction de gouvernante de l’héroïne n’est qu’un masque. Le lecteur trépigne alors de comprendre quel est son but. Dans une organisation dont elle est une main armée, le nom d’un possible leader revient : l’énigmatique Lewis (le roman lui est d’ailleurs dédié). Le protocole ne nous laisse qu’imaginer l’issue jusqu’au twist final. Nous y avions sûrement pensé mais l’aboutissement du protocole surprend et donne sens au roman. Guillaume Lavenant est habile. Il a su nous rendre accroc comme la mère de famille et la gouvernante avec la série Leslie Jones qu’elles regardent toutes les deux. Leslie Jones, c’est comme la pièce de théâtre dans la tragédie d’Hamlet : la fonction poupée russe du roman.
Guillaume Lavenant est metteur en scène dans une compagnie de théâtre basée à Nantes. Il met ici en écriture une histoire avec le même souci du détail qu’un réalisateur. L’auteur réussit une évolution artistique presque complète. Ainsi, du théâtre à la littérature, l’auteur se rapproche du cinéma Nous pourrions voir dans Protocole gouvernante quelques influences : Chabrol pour la description de la classe bourgeoise ou encore Bertrand Bonello pour le froid déroulement de l’histoire. Guillaume Lavenant débarque en littérature armé d’un solide sens de la narration. Il faut saluer la forme radicale de Protocole gouvernante. C’est un point de départ important pour un écrivain. Nous savons déjà qu’il maîtrise l’arme ultime : l’art de la fiction.