Ces dernières semaines, Arte m’a permis de découvrir Rectify, série américaine sortie en 2013, créée par Ray McKinnon. J’en avais déjà entendu du bien, mais n’avais jamais eu l’occasion de la visionner. Puis Arte a eu la bonne idée de diffuser les 6 épisodes de la saison 1, à raison de deux par jeudi soir courant octobre 2014. Malheureusement, à l’heure où vous me lirez, vous ne pourrez sans doute plus les voir en replay. En revanche, surveillez de près votre programme TV, il est possible qu’il y ait des rediffusions tardives sur Arte.
Le scénario est à première vue assez simple : Daniel, accusé d’avoir violé et tué sa petite amie alors qu’il avait 18 ans, se voit libéré du couloir de la mort grâce à de nouvelles preuves et échappe ainsi à la peine de mort après 20 ans d’incarcération. Ce qui suit, pourtant, est moins simple. Le retour de Daniel dans sa petite ville natale en Géorgie et au sein de sa famille n’est pas évident, ni pour lui, ni pour les autres. Les tensions sont palpables en ville, où une grande partie de la population le pense toujours coupable. A la maison, 20 ans le séparent de sa mère, qui s’est remariée, de sa sœur, qui a grandi, et de sa belle famille.
Rectify, c’est avant tout l’histoire d’une réadaptation. Comment vivre lorsque l’on a été coupé du monde pendant 20 ans ? Daniel doit soudainement continuer sa vie en dehors des quatre murs blancs de sa cellule. Il doit réapprendre à se lier aux autres, à partager et apprendre ce qui lui a manqué durant 20 ans d’emprisonnement. Et doit se confronter à la réalité de la vie quotidienne et à sa famille, qui surveille chacun de ses mouvements, qui appréhende ses réactions et qui, bien qu’elle soit pleine de bienveillance envers lui, ne sait pas comment se comporter en sa présence. C’est sans compter avec les habitants ainsi que les forces de police qui ne veulent qu’une chose : qu’il retourne en prison et qu’il paye pour le meurtre d’Hanna.
C’est une des plus belles séries que j’aie eu l’occasion de voir jusqu’à présent. Rectify est… déroutante. Mélancolique. Violente. Spirituelle. Émouvante. C’est aussi celle qui a réussi à m’arracher le plus de larmes en aussi peu d’épisodes (je ne compte pas le dernier épisode de Six Feet Under (dont vous pouvez retrouver la chronique ICI) qui mérite le record de mouchoirs utilisés. (Je sais, je suis trop émotive)
Tout est merveilleusement bien réalisé : de la profondeur des personnages au jeu des acteurs, de la qualité des images à la bande son (Bon Iver, Balmorhea, Sharon Von Etten, et j’en passe). Une série qui retourne la cervelle. Les épisodes se déroulent avec une langueur à couper le souffle, et sont rythmés par les souvenirs de Daniel en prison, un fabuleux mélange de rire et de violence. Le téléspectateur est happé par l’âpreté de ce que vit et de ce qu’à vécu Daniel. La mise en scène et l’utilisation du flou semblent refléter son esprit torturé, qui est de plus en plus perdu au fil des épisodes. Il se heurte à tout ce qui se passe, à sa famille, à la vie. Ses seuls repères, à part ce qu’il a vécu dans sa jeunesse, sont ce qu’il lui reste de ses lectures durant son enfermement.
« Je n’ai pas l’habitude de prendre en compte tant de variables. Il y avait des variables, en prison, mais ce n’était pas comme ici… Quand on n’a pas les années d’expérience, cette répétition quotidienne qui rend les choses banales… Parce que la banalité c’est apaisant, c’est réconfortant. La banalité, c’est l’ordinaire. Quand tout sort de l’ordinaire, c’est parfois un peu trop, tu comprends ? » (Daniel)
Peu importe finalement, qu’il soit coupable ou non. On vit avec Daniel, on dort avec lui, on erre dans la ville en sa compagnie, et on découvre le plaisir le plus simple que celui de s’allonger dans l’herbe au soleil. Mais il ne faut pas croire que tout est doux. Un malaise et une dureté sourde, indicible, planent au dessus et autour de lui. Et la saison 1 se termine avec une rare violence. Qui donne envie de voir la suite au plus vite…
Heureusement, la saison 2 est déjà sur les rails ! (Et la saison 1 vient tout juste de sortir en DVD !)
A la lecture de l’article je me suis tout de suite dis: voilà une histoire émouvante, touchante, vous faisant oublier vous même un laps de temps et penser à la souffrance d’autrui. J’aimerais tant voir ce film…