Petite question con : vous croyez aux coïncidences vous ? Quand un disque sort lors d’un presque palindrome calendaire ( le 24/01/2014 par exemple), vous pensez qu’il sera presque béni ? maudit ? victime d’une malédiction ? poursuivi par le mauvais oeil ? ou que ça n’a strictement rien à voir (quoi que… mauvais oeil…rien à voir…) avec la date indiquée. Non mais si je vous en parle c’est parce qu’à cette date fatidique est ressorti, en version deluxe, le premier album de Thomas Patrick Maguire, petite merveille lo-fi que n’aurait pas renié le Beck de One Foot In The Grave.
Thomas Patrick qui ? Thomas Patrick Maguire, jeune américain à la gueule d’ange, au caractère bien trempé, le gars fait dans l’antifolk depuis 2003 et a sorti dans un anonymat le plus complet (six albums et une poignée de Eps). Son dernier en date, In The Bag, sorti en décembre 2014, mélodiquement irréprochable même si à la limite de la dissonance, le montre un poil plus polissé et présentable que son excellent Pissing Streams. Passé inaperçu en janvier 2004, Maguire a jugé bon de lui donner une seconde chance en le rééditant, dix ans après donc (le 24 janvier 2014), avec cinq morceaux et un documentaire en suppléments, dispos en complément de l’édition cd originale. Excellente initiative pour un résultat malheureusement identique à celui de 2004. Le monde ne semble donc pas prêt pour accueillir à bras ouverts Pissing Streams et franchement, il ferait mieux d’arrêter d’être sourd. Parce qu’en matière de folk lo-fi, il n’a rien à envier à un Sentridoh, au premier Eric’s Trip ou aux Smog d’avant Wild Love.
Enregistré (pour la plupart des morceaux) sur un magnéto dans le salon avec une guitare à peine accordée, une batterie de cuisine, Pissing Streams est un petit chef-d’œuvre composé de trésors mélodiques et foutraques, dans l’esprit d’un Pavement, d’une magnifique nonchalance et non dénué d’humour (Ritalin is raining down, see if you can catch it now chante-t-il sur Hospital). Ça sature plus que de raison, ça crachouille entre deux morceaux, les arrangements sont réduits au minimum (une batterie et une guitare dans les moments les plus orchestrées) c’est mal dégrossi, brut de décoffrage, ça hésite, parfois ça ne sait pas où aller mais chaque morceau est une petite pépite folk/rock qui va droit au cœur. Tout au long de Pissing Streams on pense plus que de raison à Nirvana (Responsible Man a des réminiscences de Polly), à une sorte de Beck punk, aux slackers des années 90 puis on pense plus à rien parce qu’on se dit qu’au final, c’est juste excellent et que Thomas Patrick Maguire mériterait bien une reconnaissance au-delà du cercle des initiés. Bref, devant un album aussi passionnant et attachant, il serait temps que le monde se désensable les portugaises et se décide à offrir la place qui revient de droit à cet excellent premier album : en haut des tops. Dussions-nous attendre encore neuf ans pour la prochaine réédition.
En attendant, si Addict peut apporter sa petite pierre à l’édifice…