[mks_dropcap style= »letter » size= »75″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]L[/mks_dropcap]a promesse, tombée au printemps, était belle sur le papier. Le Canadien Patrick Watson venait enfin fouler le sol du Théâtre Antique de Fourvière à Lyon, accompagné de 56 musiciens de l’Orchestre National de Lyon ce lundi 8 juillet. L’homme était venu presque en catimini l’été précédent jouer sous un chapiteau lors d’un spectacle de Yann Frisch, Le Paradoxe de Georges, seul avec son piano droit devant 80 personnes. C’est par la grande porte et dans cet écrin de vieilles pierres qu’il a fini par revenir pour notre plus grand plaisir cette année. Un cadre évident et parfait pour ce compositeur illuminé et enchanteur. Et le présage d’orchestrations sublimant des morceaux déjà somptueux à la base.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que nous ne fûmes pas déçus. Le ciel rose qui nous accueille nimbe le lieu de couleurs douces et apaisantes, en accord avec l’atmosphère de la musique à venir. Ici, tout ne sera que luxe, calme et volupté, bien loin de l’agitation de la ville en-dessous et des soucis de la vie.
21h30, l’orchestre s’installe et se lance dans une longue introduction classique de 10 minutes. Mon absence de connaissances en musique classique m’empêchant d’identifier s’il s’agit d’un morceau de Debussy ou autre, je laisse mon esprit vagabonder librement avec plaisir entre les univers de Star Wars et de Michel Legrand. L’œuvre est foisonnante, donnant la part belle à chaque instrument. On comprend alors que l’orchestre ne servira pas d’additif ou d’épaississant aux musiques du Canadien mais jouera le rôle d un véritable duettiste. Le cadre est posé, le public conquis. Welcome to the Magic Wolrd of Patrick Watson !
L’artiste et ses 3 musiciens finissent par débouler sur la scène. Les premières notes au piano de Lighthouse permettent à Watson et son groupe de prendre possession des lieux tout en délicatesse et d’imposer subtilement leur atmosphère onirique et harmonieuse. L’orchestre finit par les rejoindre au bout de 3 minutes pour achever la 2e partie du morceau. C’est beau à couper le souffle et il en sera de même durant toute la soirée, notamment grâce à la présence du chœur de l’orchestre qui apportera énormément de force et d’émotion à la soirée. Beau sans être pompeux, Watson multipliant les facéties et les rires comme à son habitude, campant involontairement un Peter Pan nous emmenant au Pays Imaginaire. À moins que ça ne soit celui des Merveilles ?
Le chanteur se lève alors et enchaîne sur un morceau inconnu à mes oreilles, qui me fait définitivement perdre contact avec le réel environnant. Il rend ensuite hommage à Lhasa en reprenant Wooden Arms qu’il aimait chanter avec elle. Suivent les classiques Beijing, Man Like You puis une composition datant de l’année dernière, Melody Noir.
Durant la rêverie qui accompagne mon écoute attentive, Joni Mitchell et son album orchestral de 2002, Travelogue, s’invitent dans mon esprit. Souffrir de la comparaison d’un de mes albums chéris et que j’écoute sans fin est plutôt un très bon signe. J’y retrouve ce grandiose et cette intensité qui me transportent.
Watson tient alors à offrir à son public la possibilité d’écouter un morceau de musique classique joué par un orchestre. Debussy étant son compositeur préféré, l’Orchestre National de Lyon se lance dans l’interprétation des Fêtes tirées des Nocturnes. Quelques minutes de parenthèse enchantée que je décide d’accompagner d’une vue imprenable sur la ville illuminée en me plaçant ailleurs. Instant suspendu et précieux.
Le groupe revient ensuite pour poursuivre l’exploration de sa discographie avec Traveling Salesman, Adventures in Your Own Backyard, la très émouvante Noisy Sunday dédiée à sa mère disparue récemment, et Where the Wild Things Are. Arrive enfin la toujours très attendue du public, To Build A Home, la chanson qui a popularisé le chanteur et a été reprise dans maintes séries ou publicités.
En guise de conclusion d’un concert où l’émotion n’a fait qu’aller en crescendo, Patrick Watson, mégaphone à la main et accompagné des choristes de l’orchestre, descend dans la foule interpréter Man Under The Sea. Le public est alors invité à chanter le refrain et ne se fait pas prier. L’acoustique incroyable du théâtre aidant, les Just me, the fish and the sea repris en boucle par des centaines de personnes collent le frisson.
Un premier rappel avec un titre inédit Here Comes The River, puis un deuxième sur la dépouillée Je te laisserai des mots, que Patrick Watson joue seul au piano et il faut déjà se dire à regret bonne nuit et à très vite, sous la volée traditionnelle des coussins verts de Fourvière.
C’était déjà la quatrième fois que nous voyions Patrick Watson en concert, dans des lieux et des configurations très différents et à chaque fois, il ne nous aura pas déçus, nous laissant éblouis voire émus par la qualité de ses compositions et de ses interprétations sur scène. Avec pour constantes une générosité et une simplicité dont beaucoup d’artistes feraient bien de s’inspirer. L’osmose ce soir aura été totale et parfaite entre le groupe, l’orchestre, le public et le lieu, nous laissant de longues minutes après en apesanteur. Pour tout cela, un immense bravo, Mister Watson !