Basilicò, c’est un parfum avant d’être une histoire. Celui, entêtant, du basilic qui pousse dans un jardin sicilien, entre deux pots de fleurs fanées, et sous un soleil qui cogne. C’est aussi celui, plus diffus, des souvenirs de cuisine, de non-dits et de gestes plus lourds que les discours. Maria est morte, oui, mais elle a encore des choses à dire. Elle observe ses enfants réunis autour de son cercueil et en profite pour nous livrer sa recette familiale : du basilic, une dose d’amour, une pincée de rancune et surtout un secret familial bien gardé…
« Mais aujourd’hui, aucune dispute, aucune annonce de fiançailles, aucune rupture ou autre révélation ne pourront m’empêcher d’être sur le devant de la scène »
─ Guilio Macaione, Basilico
Outre la chaleur, cet ouvrage nous permet de humer la Sicile et plus largement l’Italie – la vraie, pas celle des cartes postales ! – dans toutes ses essences, de la puissance des liens du sang au poids du regard des autres, en passant par l’exercice (plus ou moins) appliqué de la foi. Et la cuisine, donc. Presque magique, omniprésente, où chaque plat dit quelque chose de celui ou celle à qui il est destiné. Quelques recettes de cuisine ponctuent même l’ouvrage aux moments clés.
Giulio Macaione use de flashbacks pour dresser le portrait d’une fratrie bancale, qui cherche encore sa place, sa légitimité et parfois son pardon. À chaque chapitre, un enfant. À chaque enfant, une blessure. Et derrière tous, Maria, matriarche à la langue acérée et au cœur cabossé, qui a élevé seule ses enfants après le départ de Pietro, l’homme qu’elle a aimé plus qu’elle ne le voulait.

Ce qui frappe ici, c’est la capacité du récit à faire remonter des émotions comme des effluves de sauce. Il y a des scènes où l’on sent presque l’ail roussir dans la poêle, d’autres où l’amertume des silences nous serre la gorge. Le trait, en noir et blanc pour les scènes actuelles mais coloré de jaune pour les plus anciennes, prolonge cette sensation d’entre-deux : entre passé et présent, entre tendresse et rancune. C’est une BD sensorielle, tactile, presque comestible.
Mais au-delà de la forme, il y a dans ce récit une narration efficace. Macaione ne fait pas dans le folklore : il saisit l’intime, le viscéral, ce qui se dit mal et se transmet pourtant. Après avoir présenté les souffrances de chaque enfant devenu adulte, l’auteur lance une intrigue qui interdit alors de refermer l’ouvrage tant il devient urgent d’en connaître la fin.
Basilicò, c’est une histoire de famille.
Une vraie. De celles qui font mal,
qui égratignent, mais qu’on porte avec soi,
comme une odeur de sauce
qu’on ne parvient jamais
tout à fait à laver de ses vêtements.
Basilicò, c’est une histoire de famille. Une vraie. De celles qui font mal, qui égratignent, mais qu’on porte avec soi, comme une odeur de sauce qu’on ne parvient jamais tout à fait à laver de ses vêtements. Un ouvrage qui se lit d’une traite sous un coin de soleil avec une boisson fraîche.