[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]A[/mks_dropcap]lors que nous vivons actuellement dans une fournaise permanente, annonciatrice d’un été caniculaire, en se traînant, amorphes à la recherche de la moindre forme de fraîcheur, voilà que les brooklynois de Beach Fossils décident de repointer le bout de leur nez en nous livrant leur troisième album, Somersault, sorti le 02 juin dernier chez Bayonet Records/Differ-Ant… et je dois bien l’avouer, je ne passe pas une journée sans écouter cette douceur, réconfort illusoire qui m’apporte cet air frais tant espéré !
Sans doute leur album le plus abouti, je vous épargnerai la formule l’album de la maturité, pesante et passe partout, mais après avoir réécouté leur discographie une bonne dizaine de fois, je ne peux m’empêcher de penser que Somersault tend à la perfection, de par sa composition tout en finesse, mais aussi le message délivré tout au long de cette balade au cœur de New-York, entre nostalgie, introspection et ce regard sur cette ville, cosmopolite, reflet d’un pays qui puise sa richesse dans ce melting-pot culturel.
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]Q[/mks_dropcap]uatre ans après Clash The Truth, Beach Fossils monte d’un cran, et quand on y regarde de près, plusieurs changements semblent participer à cette éclosion.
D’abord, et pas des moindres, le changement de label, Dustin Payseur, fondateur du groupe, a créé son propre label, Bayonet Records, avec sa femme Kate Garcia, rencontrée au sein de Captured Tracks, leur précédente écurie musicale. En 2014, cette nouvelle aventure voit le jour, en forme de cadeau de mariage, et comptant aujourd’hui six groupes, dont Beach Fossils, pour ce nouvel opus… premier indice d’une liberté retrouvée, prendre le temps de la composition, explorer de nouveaux sentiers.
Et, en effet, Beach Fossils, formation à géométrie variable – qui a vu entre autres passer, Zachary Cole Smith, qui sévit depuis 2010 au sein de DIIV – a toujours été le prolongement d’un projet solo autour de Dustin Payseur, aujourd’hui entouré de Jack Doyle Smith et Tommy Davidson, le batteur Tommy Gardner, quittant le groupe en mars dernier pour un nouveau projet. Trois membres et une composition inédite… en collaboration, jusque dans l’écriture !
J’en arrive donc à mon dernier changement, enfin je pense, mais quand nous tendons l’oreille, nous ne pouvons échapper, à ces nouvelles teintes musicales, des cordes, comme sur le morceau Saint Ivy, limite pop baroque période 60’s, on s’éloigne un peu du rêve musical, pour entendre des sonorités qui m’évoquent les Beatles, en mode Walrus, je ne sais pas si je m’égare mais les associations sont souvent inexplicables ! Et ce clip, illustration parfaite de cette Amérique, véritable mélange des genres, et un décalage évident, le pouvoir mis en place, je ne le citerai pas, erreur de casting à mon sens, et j’imagine que vivre cette situation de près doit procurer un sentiment de l’absurde, la richesse des cultures contre la stupidité ignorante, je ne pense pas dénaturer le propos… mais même si je me refuse à rentrer dans une analyse bornée des textes, le message est on ne peut plus clair !
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]C[/mks_dropcap]e n’est pas le morceau suivant qui va me contredire, May 1st, pour la bonne française que je suis, le 1er mai évoque la fête du travail, soit une journée de repos total, avec en trame de fond, les élucubrations de quelques fascistes égarés… mais aux États-Unis, cette journée est devenue au fil du temps une fête en faveur des droits des migrants, des travailleurs sans-papiers… non je ne me lancerai pas dans un débat politique, je vous rassure, mais on ne peut ignorer la connotation évidente de cet album, l’envie de continuer à vivre dans un pays où tout est possible !
Mais revenons au propos initial, la musique, je ne peux oublier avec quel enthousiasme, j’ai accueilli le premier single, This Year – que l’on vous avait présenté à cette occasion – énergie pop, qui m’avait laissé le sentiment d’un bel album en prévision, et l’annonce d’un featuring avec Rachel Goswell de Slowdive… promesse tenue, puisque ce titre se révèle addictif, Tangerine, montée de guitares, dialogue à deux voix et cette ligne de basse…!
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]E[/mks_dropcap]t que dire du morceau Ride, avec en featuring le chanteur de Cities Aviv, Gavin Mays, rappeur atypique de Memphis, je dis atypique, car après quelques recherches, le garçon semble osciller entre influences post punk (mais oui), et des noms barbares de rappeurs dont je ne connaissais pas l’existence avant cette chronique (je l’avoue)… pause extatique au milieu de cet album, seulement 1 minute 41, montées de saxophones… et enchaînement sur le morceau Sugar, ma merveille à moi, la rondeur de la basse tout au long du morceau, la rythmique nonchalante, le clavier en appui, perte de repère et recherche de soi au cœur de la ville… à l’écriture de ces lignes, j’écoute en boucle ce titre, pensées nostalgiques…
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]L[/mks_dropcap]e clavecin de Closer Everywhere nous renvoie une fois de plus à cette pop baroque d’un autre temps, nous sommes loin du premier album et ses influences à tendance post-punk, la mélancolie s’étend à l’infini, seul au milieu de la foule, quelque part dans nos souvenirs… échantillonnages de sons de rues bondées et animées dans Social Jetlag pour prolonger cette sensation de solitude, notes jazzy, entre piano bar et saxophone aérien, In the shadow of the night / I wanna fade away, décidément cet album comporte différents niveaux de lecture… constat social… repli sur soi.
Mais il semblerait que les trois derniers morceaux de ce bijou sonore nous appellent à nous ouvrir vers les autres, rejoindre les rangs comme dans Down The Line, tout en réfutant une certaine vision de l’Amérique, énergie pop, du pur Beach Fossils, aller de l’avant malgré tout… même si nous pensons que tout espoir est caduque, Be Nothing, n’être plus rien, contradiction entre l’être et le néant, beauté de la mélodie, avec une touche dreamy, montée shoegaze… et en conclusion, Keep moving on / That’s all for now, quoiqu’il arrive nous devons continuer à nous battre pour ce que nous sommes, ce que nous voulons, légèreté de la ritournelle, But i woke up back again, la vie continue… !
Et cet album n’a pas fini de m’émerveiller, travail de longue haleine, enregistré dans différents studios de New-York, dans une cabane ou encore à Los Angeles, avec notamment, et c’est important de le souligner Jonathan Rado de Foxygen, qui a contribué à une partie du mixage… Somersault, un album multi-couches, d’une richesse incroyable mais je vous laisse en juger par vous-même, j’en ai sans doute déjà trop dit, je tiens mon album de l’été, et j’irais même jusqu’à dire, un de mes albums de l’année !
Somersault, de Beach Fossils est sorti le 02 juin 2017 en CD, Vinyle et Digital chez Bayonet Records / Differ-Ant, il est disponible chez tous les bons disquaires mais aussi par ICI ! Et pour susciter l’envie, un lien d’écoute !