[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]Q[/mks_dropcap]u’il doit être difficile d’être constamment sur le grill de vils tableaux comparatifs ! Le handicap de ne pas être né à l’époque d’une ère comblée de fourmillements créatifs, d’être toujours assimilé à ses semblables tels My Bloody Valentine ou Slowdive, eux-même estampillés à tort ou raison comme pâles suiveurs de Cocteau Twins… Si je m’essayais à l’escalade de l’arbre généalogique, je pourrais bien retrouver un Néandertalien ayant eu l’idée géniale de taper sur un rocher avec un fémur de mammouth (le tout résonnant au fond d’une grotte diffusant une sonorité unique car chargée de colossales réverbérations).
Beach House pourrait souffrir de cette insistante pression mêlée au désagrément d’être catalogué dans une rubrique où l’étalonnage est de mise. La dream pop est une telle nébuleuse que les mises en parallèle semblent incontournables. J’imagine déjà le pesage méticuleux pour savoir si leur septième album sera ou non digne des dernières fournitures du genre, délivrées autant par les confrères (Daughter, The Radio Dept, Cigarettes After Sex…) qu’à la lueur de leur propre discographie.
Une épopée qui débuta pour Victoria Legrand et Alex Scally en 2004. Après un premier album homonyme sorti en 2006, le duo forgea sa renommée jusqu’au transfert d’écurie de Carpark Records à Sub Pop. Le succès d’estime devint essor plus ample avec Teen Dream le bien nommé puis leur sommet inégalé à ce jour, l’envoûtant Bloom. Un disque remarquable qui fit de leur fragilité orchestrale une force musicale incommensurable.
Autant vous dire que Depression Cherry qui lui succéda trois ans après était attendu au tournant. J’ai envie de vous dire que la seule faute de goût fut celle d’une pochette hideuse, coquille ragoutante ne trahissant pas la beauté du contenu. Un moindre mal visuel vite évacué « auditivement » par une expérience accrue dans le traitement des atmosphères aussi légères que faussement chétives. Les Baltimoriens osaient la livraison d’un second opus le même millésime (Thank You Lucky Star) sans vraiment ajouter de sel au menu.
Beach House avait fait des émules et la combine, étirée plus que de nature, n’avait plus la même saveur – à force sans doute de tiques répétés jusqu’à l’ennui. Les collectionneurs pouvaient néanmoins se goinfrer d’inédits et b-sides dans un recueil paru l’an passé.
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]D[/mks_dropcap]epuis le 11 mai 2018, il nous faut ajouter une nouvelle variable à l’appréhension du phénomène bien installé dans un réel confort de notoriété. L’entame de 7 est saisissante. Si Dark Spring laisse subodorer un printemps taciturne, la nouvelle mouture semble avoir plongé du phosphore dans l’éther. L’exécution est télégraphique et les yeux sont rivés sur des pédales d’effets aux bourdonnements scintillants (Pay No Mind).
L’enchaînement sur les nappes plus classiques de Lemon Glow nous renvoie à quelques repères qui transcendent la simple rengaine synthétique. Le morceau, au même titre que les deux qui le précède, est bigrement efficace et s’immisce parfaitement dans l’habituel passeport destiné à nous faire planer les yeux grands ouverts.
La suite du disque est plus étrange, marquée d’un magma minimaliste et syncopé où se perdent les claviers. Je note néanmoins Dive dont la timide progression prend son envol puis emprunte une veine rythmée qui n’est pas sans rappeler certains confluents de la new wave.
Il ressort des premières écoutes de 7 la confrontation vis-à-vis d’une énième pierre frôlant la perception de mouvements trop statiques, glissant parfois sur un écho aux « airs versaillais ». Il y a sans doute la sensation de subir une sauce délayée par trop de redites et pas assez de prise de risques.
Ce jugement serait trop hâtif. Il faudra sans aucun doute plusieurs relectures pour apprécier à sa juste valeur le nouveau venu. Si vous insistez un peu plus, il vous sera aisé de capituler à l’écoute d’une agréable propagation, sous couvert de ballades post-futuristes manœuvrées au ralenti (Girl of The Year) où l’effacement graduel nous embarque une fois encore vers un monde où les cœurs palpitent au gré de doux apaisements. De nos jours, c’est un grand luxe de s’offrir un aussi agréable moment de répit !