
L’an prochain, il soufflera les vingt bougies de son émancipation artistique. Un premier album solo dont le titre rendait hommage à sa mère décédée alors qu’il n’était qu’enfant.
Il y a quatre ans, c’était sa nombreuse famille qui était à l’honneur avec toute sa mixité et son histoire. Ce n’est pas un hasard d’ailleurs si le Kid de Knowle West disperse depuis des lustres une musique aux influences multiples. Des humeurs changeantes et radicales affranchies de toute contrainte dictée par l’industrie et le milieu.
Cette fois ci, c’est sous son réel patronyme qu’il revient sans avoir attendu bien longtemps depuis sa dernière sortie. Une sorte de mise à nu derrière un écran de fumée stylisé. Se dévoiler sans pour autant en rajouter car on connait quand même l’intéressé pour ne pas être surpris par ses nouvelles salves. Le feu qui brule à l’intérieur de l’un des artistes les plus redoutables et redoutés de sa génération. Pas commode le garçon certes mais s’il faut éviter de dompter ce fauve, il n’est pas interdit de lui laisser comme crédit cette capacité déconcertante d’hypnotiser son petit monde de fans (et moi le premier).
Alors qu’une rumeur puis promesse de retour du côté des anciens compagnons nous est parvenue il y a quelques mois avec une certaine excitation et attente impatiente, Adrian Thaws n’oublie pas pour autant de poursuivre sa route sur les chemins de traverse. Un album qu’il définit lui-même par la volonté de reconstituer l’univers d’un club de hip hop. Tout un programme !
On descend alors dans ce lieu où les collaborateurs s’entassent mais où la muse privilégiée reste encore Francesca Belmonte. Tricky (car c’est bien de lui qu’il s’agit) brouille les pistes. Il martèle une fois n’est pas coutume son tracklisting de titres assassins, morceaux de bravoure qui alternent sans aucune précaution avec des vapeurs langoureuses. La voix asthmatique soignée aux herbes semble encore plus comme la caresse aiguisée qui vient contraster avec un chant sensuel des plus sexuels.
Lonnie Listen et ses sursauts de fièvre laissent entrevoir un nightclubbing malfamé. Question repère glauque qui balance ses bombtracks dans la face, le must du must arrivera avec le percutant Gangster Chronicles. En guise de clin d’œil jouissif, un sample déjà bien connu et usité du côté de Bristol (Planetary Citizen de John McLaughlin) … Question leitmotiv électrique, Why Don’t You n’est pas en reste. Comme si les prodiges du « big beat » avaient tous été conviés à la table du maître de cérémonie.
Dans ce club, la nicotine n’est pas prohibée bien au contraire. Outre celle-ci, on trouve d’autres substances alléchantes et pas forcément licites. Reprise de Silly Games alors pour une ironie évidente.
Des titres finalement courts qui vous laissent à peine respirer. On suffoque presque de cette matière brute. Tricky n’a cure des changements de tempo, des sonorités qui s’entremêlent. On a même le sentiment que certains mixages approximatifs font partie du concept.
Reste à vous parler de mon affection particulière pour My Palestine Girl. Irradiante production qui vient vous happer en plein désert. Ce n’est pas une nouveauté chez ce lascar mais on ne peut s’empêcher de récidiver dans l’admiration que ce titre inspire. Basse aussi lourde que possible, phrasé venimeux, nappes extatiques pour le plus beau des effets.
Adrian Thaws, énième du nom aura lui aussi eu le pouvoir de me faire replonger dans la discographie complète de son double. Une drogue, il faut bien l’avouer, des plus tenaces.
A l’inverse, bien que fan de Tricky, j’ai été bien déçu par ce disque, loin du retour en grâce de False Idols l’an dernier.