C’est toujours un plaisir d’ouvrir une bande dessinée signée des éditions Sarbacane. La garantie d’un ouvrage de belle facture. Akkinen, zone toxique n’échappe pas à la règle. Mise en page soignée, ton ocre et couleur rouille habillent les cases de ce roman graphique d’Iwan Lépingle, sur fond de trame policière et de combat écologiste dans le Grand Nord.
Face au géant Géotrupe, une entreprise d’exploitation de sables bitumineux, se dresse deux hommes atypiques : Aslak, un artiste quelque peu en marge de la vie d’Akkinen, ville endormie sous un épais manteaux neigeux ; et Pekko, un écologiste contestataire qui accuse Géotrupe d’empoisonner l’eau et donc une part importante du réseau hydrographique du pays.
Mais les deux hommes sont isolés dans ce combat pour l’environnement L’entreprise locale fait vivre de nombreux habitants, qui préfèrent occuper leur temps libre à chasser ou à boire quelques verres au bistrot plutôt que de s’attaquer aux monstrueuses machines d’extraction et à leur patron, Elias. Il est vrai que celui-ci sait y faire pour couper court aux rumeurs et interprétations : à la moindre protestation, il n’hésite pas à muter les employés récalcitrants hors de la ville, à la recherche de jours meilleurs.
Alors quand arrive Gaspar, frère d’Elias, les retrouvailles sont plaisantes mais on sent bien qu’il ne faudra pas grand chose pour que la malhonnêteté du second fasse sortir le premier de ses gonds. Les rivalités vont s’exacerber avec, au centre du jeu, la fille de Gaspar, prénommée Tessie. Jeune et idéaliste, elle va éveiller la conscience de son père et provoquer chez lui le besoin de vérité.
Dans la tradition des grands récits façon David contre Goliath, l’histoire se révèle prenante. Entre une séquence de plénitude dans le froid polaire d’une immense forêt et deux coups de sang, entre faux-semblants et manipulations fratricides, le suspens est total et nous engage à avaler rapidement la centaine de pages.
Histoire manichéenne agrémentée d’une large touche de dépaysement, Akkinen offre un bon moment de lecture et nous fait courir sur l’échine comme un petit frisson. N’attendez donc pas trop de temps pour le feuilleter, vous pourriez prendre froid.