[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]F[/mks_dropcap]igure emblématique du cinéma américain et international depuis les années 60. Mais aussi homme aux multiples facettes, voir même vies, tant la carrière du Californien, en tant qu’acteur et réalisateur, est d’une immense richesse et diversité.
Sur son passé et son enfance, Clint Eastwood aura toujours été trouble ne laissant que quelques bribes à ses biographes. Il grandi dans la banlieue de San Francisco durant les années 30. Élève rebelle, passionné de jazz et de théâtre, il est repéré par Universal, à la sortie de ses études, grâce à son physique atypique. Il enchaîne alors les rôles de figurant dans de nombreux westerns produit par la compagnie durant les années 50 et accède à la notoriété grâce au feuilleton Rawhide, énième western mais cette fois-ci son personnage séduit les spectateurs.
Cependant c’est surtout en acceptant de jouer dans un mystérieux western italien réalisé par un inconnu que ce jeune acteur plus vraiment tout jeune prend une autre dimension. C’est l’avènement de l’homme sans nom, archétype que Leone déclinera dans les trois films de la Trilogie du dollar (Pour une poignée de dollars, Et pour quelques dollars de plus, Le Bon la Brute et le Truand). Le justicier taciturne, redresseur de torts et moralement ambigu deviendra un personnage légendaire du cinéma mondial, Leone et Eastwood connaitront un immense succès en Europe.
Pour autant sa carrière ne décolle toujours pas aux États-Unis et reste marquée sous le sceau du western. En témoigne sa collaboration avec Don Siegel pour Sierra Torride et les Proies en 1970 et 1971. La même année il réalise son premier film, dans lequel il est aussi acteur, Un frisson dans la nuit. Un film où il y explore aussi son autre grande passion, le jazz et ayant une tonalité volontiers progressiste en évoquant la libération sexuelle. Des thématiques diamétralement opposées à son prochain film et à la saga qui s’en suivra resté célèbre : L’Inspecteur Harry. Transposition du cowboy justicier et vengeur dans un cadre moderne et urbain, cette série de film bien qu’efficace en termes d’action et de divertissement, reste parcouru par un sous-texte réactionnaire voir même fascisant que les critiques n’hésitèrent pas à pointer à l’époque. Ce grand écart entre les Un frisson dans la nuit et Harry Callahan deviendra caractéristique chez ce républicain convaincu qui enchainera les actioners bourrins et les tragédies intimistes durant toutes ces années.
Par la suite Clint Eastwood débute une longue collaboration qui dure encore aujourd’hui avec la Warner Bros et un premier succès avec Josey Wales hors-la-loi, western crépusculaire d’avant l’heure. L’éternel cowboy va ensuite s’aventurer dans d’autres registres : le film de prison (L’Évadé d’Alcatraz), la comédie (Doux, dur et dingue, Ça va cogner, Bronco Billy) et la tragédie pour laquelle il excelle avec son fils, Kyle devenu un jazzman de renom depuis, dans Honkytonk Man en 1982. Tout en revenant toujours irrémédiablement au western avec Pale Rider, le cavalier solitaire. En 1987 son biopic sur Charlie Parker, Bird, vaudra le prix d’interprétation masculine à Cannes pour le génial Forest Whitaker et illustre aussi l’autre Eastwood, la fin mélomane, féru de jazz. Il produira aussi de nombreux documentaires passionnants sur ce genre musical. Enfin vient Impitoyable, son tout dernier western, iconoclaste et mélancolique. Par la suite il offrira un très beau rôle à la grande star des années 90 : Kevin Costner dans le road movie, Un Monde Parfait. Et il s’offrira pour lui-même une célèbre idylle avec Meryl Streep dans Sur la Route de Madison.
Au début du XXIe siècle, les cowboys feront une dernière fois leur retour…mais dans l’espace (Space Cowboys). Clint Eastwood s’affirme surtout comme l’un des plus grands réalisateurs de son époque en mettant en scène des œuvres variées telles Mystic River et Million Dollars Baby. Obsédé par le passé il s’impose aussi comme un cinéaste historien, nous contant les grands événements du siècle précédent mais toujours à hauteur d’Homme (Mémoire de nos pères, Lettres d’Iwo Jima, L’Échange, Invictus, J.Edgar). Tout en restant un formidable tragédien comme avec le fameux Gran Torino. Plus récemment il s’est consacré à une célébration de l’héroïsme ordinaire américain avec American Sniper, Sully et Le 15h17 pour Paris. En bref à 87 ans et un peu près autant de films, le pistolero taiseux de Sergio Leone des débuts a depuis eu l’occasion de beaucoup s’exprimer et semble encore avoir de nombreuses choses à dire.