[dropcap]S[/dropcap]ur la pochette du précédent album, il y a cette photo de Laurent Eyen, clope au bec, floqué du titre de l’œuvre. Tout simplement Laurent, véritable révélation sur la galette mais surtout une énorme promesse issue de la scène tapageuse belge. Sur les planches, cela reste au titre de claque faramineuse car transpirante, généreuse, sans frein. Alors forcément la suite, nous sommes beaucoup à l’avoir attendue comme la compensation aux temps de frustrations.
Cette fois-ci, nous retrouvons un nouvel alchimiste aux manettes. Amaury Sauvé s’est chargé de l’enregistrement et du mixage. Le groupe lui devait bien l’appellation de la nouvelle production. On ne change pas un clin d’œil qui fonctionne même si, cette fois, le patronyme préféré au prénom pourrait presque présager d’un sauvetage de la planète suite à un vibrant appel à l’aide ? Pas évident à l’écoute de la partoche !
Sauvé a été mis en boite à Laval et rien que cette info devrait vous fixer à l’esprit le côté exotique de la démarche. Notons d’ailleurs, l’ultime piste 53, acrobatie instrumentale en hommage à la Mayenne que nous n’aurions jamais imaginé décrite musicalement avec autant de slides sur le manche, de bourdons électriques et d’épais larsens.
Album bruitiste jusqu’au bout des ongles, sauvagement exulté par les quatre d’It It Anita posant ici une nouvelle pierre angulaire à l’édifice (peut-être celui brossé par Fab Severage Tattoo sur la pochette). En tous les cas, une taille toujours aussi tranchante pour ne pas dire carrément plus affutée, avec une minutie criante dans l’emploi des composantes. Une coupe qui reste donc franche, goupillée avec autant de précision que de furie. Sauvé sonne alors comme une bâtisse hantée par les remous de l’époque. Les textes de Michaël Goffard en sortent comme la caisse de résonance d’un étourdissement collectif. Impossible de ne pas y déceler plus de noirceur entre les lignes, plus de tensions palpables à travers les dix titres qui détonent en pleine gueule.
Alors forcément, dès l’entame de Ghost le noise lourd et strident s’offre à notre ouïe avec la délicatesse d’un mammouth. La troupe hurle à l’unisson « she lives in my head, i swear, i can feel her breath on my skin… » A la suite, difficile de ne pas songer aux effusions psyché-dingues des Oh Sees et leur capacité à rythmer la donne tout en foutant un sacré bordel. Le vacarme devient orgastique grâce à cette mécanique articulée sur les roulements ultra speeds du gladiateur planqué derrière les fûts. Grésillement de canailles avec l’exécution profondément brûlante de See Through. L’ensemble apparait bien plus marqué, le résultat d’un rock racé, se parant par moment d’allures bigarrées. Je pense notamment à More dont les riffs nous kidnappent puis nous assènent les influences évidentes chopées chez Lysistrata, camarades de jeux appliqués dans un math-rock assoiffé de décibels, appuyant encore plus sur les effets venus rameuter les amateurs de gros barouf.
Pour autant, It It Anita ne néglige pas les contrastes voire les confrontations en sourdine, s’appropriant alors quelques injections plus retenues, accentuant alors le propos tel l’affirmation de soit face aux tentatives de manipulation des esprits (Authority) puis balançant la matière avec l’espièglerie de craquements abrasifs : Dixon, Kentucky dont la filiation en direction de Sonic Youth semble éclatante, notamment par l’entremise de saturations finales de haut calibre.
Au rayon des titres qui se détachent du lot, j’aurais tendance à vous préconiser l’urgence « tatapoum » du compulsif Cucaracha. Comme le souligne si bien son auteur, sur cette partie, ils ne combattent pas dans la même division. Je n’oublie pas Routine et sa furie martelée par les ricochets vocaux, outre les saccades portant une critique acerbe de nos vies dociles et mercantiles … Moedoh et son leitmotiv s’achevant sur une escalade euphorique bien que chargée d’inquiétude pour cette métaphore de lassitude bigrement bien sentie.
Sauvé se veut incisif, obsédant et alarmiste. La marque d’une progression rageuse et acérée chez It It Anita, un gang exalté, décidément amené à remuer la poussière et sans doute nos esprits.
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Sauvé – It It Anita
Vicious Circle Records – 02 avril 2021
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Image bandeau : Titouan Massé