[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]L[/mks_dropcap]’univers pop moderne est un champ des possibles infini pour qui s’arrache de la pesanteur des courants dominants : galaxies de genres, constellations de groupes, étoiles montantes, filantes ou planétaires, et autres « extraterrestres » liés entre eux par la gravitation. Un système animé de mouvements dont l’exploration tient moins du saut dans l’inconnu que de la conquête de nouveaux territoires, supposément lointains et mystérieux mais se révélant souvent accessibles avant de devenir familiers.
Artiste lunaire à la discographie solaire, Jane Weaver a cette force d’attraction. Le pouvoir de dissiper l’ombre énigmatique de ses penchants expérimentaux (electronica, krautrock), abstraits et conceptuels, dans des flamboiements folk, illuminations psychédéliques et scintillements discoïdes portés par un chant magnétique. De ce télescopage entre atmosphères nébuleuses et matières célestes est né le vertigineux The Silver Globe en 2014, dont la reparution l’année suivante, auréolée d’un deuxième disque (The Amber Light), figurait l’acmé d’une trajectoire tout sauf accidentelle.
Autant dire que les radars des mélomanes érudits étaient en alerte à l’heure du lancement de la nouvelle fusée interstellaire de la Liverpuldienne, prête à sonder les différentes sources de la création pour mieux dresser son thème astral musical. Aussi s’est-elle pour cela isolée sur l’île d’Anglesey, ancienne terre initiatique des druides, afin de se connecter aux éléments avant de prendre les commandes d’un studio bardé de synthétiseurs analogiques. Ou comment transformer la quête intérieure en odyssée cosmique, les ondes galloises en symphonies rétro-futuristes… et passer du lo-fi à la sci-fi, toujours en mode DIY.
Délicatement mise sur orbite par un premier single à la mélopée éthérée (Slow Motion), sa capsule s’arrime fermement aux avant-postes du genre (Air, Beach House sur Valley et Ravenspoint).
Et lorsque, pleine d’énergie (le chimique et puissant The Architect), elle s’élance à la vitesse de la lumière (le syncopé H>A>K, climax du disque), le temps et l’espace se contractent, lui permettant de rejoindre ascendants démiurges (Can, Kraftwerk, Giorgio Moroder) et aînés tutélaires – Broadcast, Stereolab (Did you see butterflies ? Modern Kosmology, Loops In The Secret Society) – dans un sidérant voyage d’une beauté sidérale.
Modern Kosmology (Fire Records), sortie le 19 mai 2017
En concert le 2 juin à La Maroquinerie avec Bertrand Burgalat et Froth dans le cadre de la Gonzaï Night