Il y a trois ans, la chanteuse et productrice Keren Ann délivrait You’re Gonna Get Love, un septième album à la séduisante ambivalence, autant inspiré par la réjouissante naissance de sa fille que par la douloureuse disparition de son père. Derrière un écrin folk-rock à la fois rêche et soyeux, elle nous présentait une mise en musique, à la fois lumineuse et intense, d’un double travail de deuil, celui de la perte d’un être cher conjugué à celui d’une certaine innocence enfuie, tournée telle la page cruciale du roman de sa propre vie.
En attendant Bleue, son nouveau long format qui sortira en mars prochain, Keren Ann en dévoile aujourd’hui un premier extrait qui, s’il pose les bases d’une approche musicale tout à fait différente, semble bien creuser encore plus près de l’os les thématiques précédemment explorées. Troquant la chaleur des guitares boisées pour la clarté feutrée d’un motif de piano insistant et solennel, Sous L’Eau marque par ailleurs le retour de la musicienne à la chanson francophone, quinze ans après Nolita, qui était le dernier disque à ce jour à la voir s’exprimer de la sorte.
Accompagné par un clip aux textures aquatiques aussi accueillantes qu’inquiétantes, réalisé par l’artiste elle-même et inspiré de la poignante missive d’adieu laissée par l’écrivaine Virginia Woolf juste avant son suicide, ce titre à double détente, faussement serein puis sourdement anxiogène, voit la chanteuse répéter sur tous les tons, du plus nonchalant au plus bouleversant, tel un leitmotiv implacable, que l’amour qu’elle vit et qui la travaille sous nos yeux (et dans nos oreilles) pourrait bien être la cause de sa perte prochaine. Alors que la progression subtile du morceau voit le thème principal magnifié par un tapis de cordes d’une élégance rare, son final s’abat sur nous, tel un couperet fatidique, dans un écho à la fois vaporeux et fracassant, aussi subtilement suggéré qu’incroyablement touchant.
Sans rien dévoiler de plus au sujet de sa chair musicale concrète, on peut déjà confier que cette thématique explicitement aquatique, dessinant aussi bien la métaphore salvatrice d’une source d’euphorie vitale et précieuse, que l’allégorie envahissante d’une (petite) mort surfant sur un élément dangereux et incontrôlable, submerge les nouvelles confessions troublantes de Keren Ann, qui n’a jamais eu son pareil pour faire nôtres ses questionnements les plus personnels et intimes.
Pour sa part, Bleue sortira des eaux le vendredi 15 mars 2019 via Polydor/Universal.
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