[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#f0d54f »]A[/mks_dropcap]près Le Chagrin des Vivants, paru en janvier 2016, c’est avec un plaisir non dissimulé que nous retrouvons Anna Hope dans son second roman intitulé La Salle de Bal.
Nous sommes en 1911 dans le Yorkshire, plus précisément dans l’asile d’aliénés de Sharston, endroit « idyllique » pour ses pensionnaires. Tout ce petit monde vit en autarcie, travaille (dur, certes, mais ils sont mieux là que livrés à eux-mêmes paraît-il), est logé, nourri et blanchi. Cerise sur le gâteau, un programme de musicothérapie totalement novateur est mis en place par le docteur Fuller, convaincu de l’efficacité de la chose. Alors, tous les vendredis soirs, les plus sages ont le droit de se retrouver dans la salle de bal, et ils dansent.
Ella arrive à Sharston parce qu’elle a voulu voir la lumière du jour… elle a brisé une vitre opaque dans la filature qui l’emploie depuis son enfance. John est irlandais, qualifié de « mélancolique ». Il a vécu un drame qui lui vaut cet internement.
C’est dans la salle de bal que ces deux solitudes, ces deux révoltés, vont se croiser. S’aimer. Rêver. Et s’écrire des lettres, de belles lettres.
Pris de mégalomanie, le docteur Fuller rêve de briller par ses recherches et va donc suivre la mouvance du moment, à savoir la mise en place d’un programme eugéniste dont les « bénéficiaires » seront les malades de Sharston.
La Salle de Bal est une histoire prenante, bouleversante, qui met en lumière des faits historiques peu connus, du moins à ce moment et à cet endroit précis.
L’écriture est fluide, lumineuse malgré l’obscurité, prend par le cœur, et on se laisse emporter par cette valse des mots, par cette angoisse latente, par cet amour naissant. On maudit ce médecin, on maudit Churchill qui prône l’eugénisme. On retient son souffle jusqu’à la fin.
Une bien belle lecture donc, parmi tant d’autres de cette rentrée littéraire.
La Salle de Bal d’Anna Hope
Traduit de l’anglais par Élodie Leplat, Collection du Monde entier, Gallimard.