[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#6b9691″]L[/mks_dropcap]e silence. Le noir et le blanc. La neige et la pluie. Le soir qui tombe. Les ombres omniprésentes et chassantes.
L’œuvre de Philippe Claudel, Le rapport de Brodeck, grand livre paru en 2007, est adapté en bande dessinée par Manu Larcenet, tout juste sorti de sa série Blast. On ne peut pas dire que l’auteur aille vers quelque chose de plus gai.
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Un lieu indéfini, en montagne, un village, une guerre à peine terminée qui a laissé beaucoup de traces, dans les têtes et dans les corps.
Brodeck vit là, avec sa femme, sa petite fille et une sorte de grand-mère qui l’a recueilli, enfant, dans une autre guerre. Il rédige des rapports sur la faune et la flore, rapports envoyés à la ville.
Il est alors désigné par les villageois pour écrire une autre sorte de rapport : celui qui rendra compte d’un événement particulier et tragique qui vient d’avoir lieu au village.
Larcenet nous décrit le dilemme de Brodeck à travers les visages aimants de sa fille, de la grand-mère et de sa femme, toujours un peu ailleurs (on sait pourquoi si on a lu le roman).
Il veut protéger sa famille et décide donc d’écrire ce fameux rapport, mais sa conscience le pousse à en écrire un autre qui dira la vérité.
Homme perdu, homme traqué et scruté, Brodeck est dessiné par Larcenet comme un pauvre homme, vieux, tendu entre la soumission et la rébellion, aux yeux tombants mais aux mains menaçantes.
Son passé de prisonnier est proposé par l’auteur à travers des hommes monstrueux et des animaux fantasmagoriques. Pages difficiles à supporter.
Œuvre noire et fascinante, Manu Larcenet propose, non pas une relecture, mais une sorte de complément au roman de Philippe Claudel. Une histoire presque sans paroles où l’essentiel se voit dans les visages, les paysages, les petits détails, comme un couteau à la ceinture qu’on est prêt à sortir pour découper les pages ou commettre un meurtre.
Le rapport de Brodeck, tome 1 et 2, de Manu Larcenet, adaptés du roman de Philippe Claudel, Éditions Dargaud, avril 2015 et juin 2016.
Une oeuvre qui se rattache à la noirceur présente dans de nombreuses oeuvres de Larcenet.