[dropcap]L[/dropcap]a 3e édition du VYV Festival a pris ses quartiers de presque été les 11 et 12 juin à La Combe à la Serpent, un parc verdoyant proche de Dijon. Piquée par la curiosité d’une affiche plutôt gonflée, mêlant Shame à Véronique Sanson, aux Vulves Assassines et Gaëtan Roussel, je m’y suis rendue ces deux jours, embarquée joyeusement depuis Lyon par des techniciens du son très sympas.
Samedi 11 juin
Sitôt arrivée dans l’historique capitale de la moutarde, je me rends compte que le festival met les petits plats dans les grands pour bichonner ses festivaliers avec un service de navette ultra efficace et un site qui ferait verdir de jalousie le jardin d’Eden. La Combe à La Serpent est en effet un immense espace préservé où les arbres foisonnent, offrant une ombre salvatrice à ses occupants et où il est permis d’entendre les oiseaux chanter, même quand un artiste fait ses réglages pré concert. Les transats ou gros coussins foisonnent entre les nombreux stands associatifs. Même les toilettes sont cools et super entretenues et ce n’est pas un détail quand tu dois cohabiter en extérieur deux jours avec des milliers de festivaliers, parfois imbibés. Bref, tu as le choix entre t’éclater devant une scène, aller voir les nombreuses animations qui émailleront ces deux jours ou chiller en mode pépouze pour reprendre des forces ou tuer le temps. Le paradis quoi.
Ayant débarqué sur les dernières notes de Gaëtan Roussel, je décide de prendre mes marques en arpentant le très grand et joliment nommé Chemin des Beaux Jours, espace où de nombreuses associations solidaires animent de manière intelligente le site.
J’arrive alors devant Sopico, inconnu à mes oreilles, attirée par des fans en très grande forme. Le set est séduisant, Sopico mêlant avec réussite rap et guitares électriques sur des textes très bien écrits. Un son inédit et efficace que je me promets de réécouter sitôt rentrée.
Après cette heureuse mise en bouche et d’autres circonvolutions sur ce décidément très beau site, me voici enfin à l’heure du début de Véronique Sanson, une légende que je rêvais d’entendre en live. Aussi radieuse que le soleil qui l’éblouit, la chanteuse compositrice délivre devant de nombreux fans de tout âge un concert heureux de retrouvailles, reprenant un panel de chansons qui parcourent l’ensemble de sa drôle de vie d’artiste et soutenue par une cohorte de musiciens impeccables. Je m’étonne du caractère immuable de sa voix qui n’a pas bougé d’une corde vocale depuis ses débuts, aussi puissante ou douce qu’avant. Tantôt tigresse, tantôt petit bout de femme fragile, Véronique Sanson nous déballe tout, de ses joies à ses errances, avec une énergie communicative qui nous colle le frisson durant cette heure et quart qui passe trop vite. De la très grande classe, musicale et humaine, non surjouée comme on en voit peu finalement.
J’ose espérer pour me remettre de mes émotions me trouver et manger un morceau devant Eddy de Pretto mais les dieux semblaient en backstage durant ces deux heures à venir tant la queue devant chaque stand de restauration était interminable (faites quelque chose pour améliorer cela l’an prochain par pitié, messieurs et mesdames les organisateurs.trices), faisant rater de multiples concerts aux festivaliers. La déception et l’énervement commence à gagner le site jusqu’au point d’orgue où le groupe électrogène secondaire de la grande Scène de la Combe eut la bonne idée de rendre l’âme mettant fin durant une demi-heure aux mélopées du chanteur. De nombreux bouts de chou aux yeux fatigués et déçus n’eurent pas le plaisir de voir la fin du set de leur artiste chéri après cette coupure car il était déjà l’heure pour eux de reprendre la navette. Pas glop.
En attendant le show de M.I.A, je patiente avec quelques churros secs hors de prix faute de mieux en tentant d’étourdir la fatigue bien décidée à m’engourdir. Débute alors le set culotté des rennais de Gwendoline, assurément ma découverte du festival. Nos quatre garçons dans le sirocco démarrent, devant un public trop peu fourni, un concert vite irrésistible, aux sonorités new wave contrebalancées par des paroles cyniques et je-m’en-foutistes imparables. Désenchantés mais énergiques, le groupe réussit l’exploit de rameuter de plus en plus de public qui en redemande et chante en chœur » Tout va bien cet été, chèques vacances, chèques vacances », tube en venir de l’été 2022. Las, le rappel n’est pas permis. En tout cas, s’ils passent cet été près de chez vous, foncez les voir et à défaut, posez vos oreilles sur leur album Après c’est gobelet !, paru cet hiver, pour une bonne séance de rire noir.
Requinquée, je pars m’éblouir devant M.I.A. qui sera pour moi le dernier concert de la soirée, histoire de conserver quelques forces pour un lendemain bien plus punk. Énorme cadeau pour un public bien décidé à s’amuser jusque tard dans la nuit, le concert est flamboyant de bout en bout, visuellement et musicalement.
M.I.A., accompagnée de ses de deux danseuses énergiques et d’un visuel puissant, limite épileptique, balance un set haletant et généreux, allant même faire monter sur scène les filles du public sur le génial Bad Girls. L’artiste n’a pas froid aux yeux et ose tous les thèmes, toutes les musiques, tous les costumes sans trembler. C’est qui la boss ? Bah, assurément M.I.A. ! Go to dodo pour moi !
Dimanche 12 juin
Après un café partagé dans la cour de notre location avec une instit chambérienne admirative (comme je la comprends) devant le boulot incroyable fourni par les roads et ingés sons et lumières sur le festival, me voilà repartie pour un deuxième jour qui ne ressemblera pas une redite tant la programmation contraste avec celle de la veille. En effet, aujourd’hui, j’ai à me mettre sous la dent Shame, The Murder Capital, The Smile et Idles, peut-être plus encore si j’y arrive, le tout sous un ciel orageux. Pogo power !
Avant d’attaquer les festivités, accablée par une chaleur étouffante pré-orage, je me cale à La Terrasse, un endroit reposant à l’abri de la foule, pour me prélasser sous les arbres. Là, j’écoute les oiseaux disputer la vedette aux balances de Shame qui s’annonce et observe amusée les chanteurs de Idles et The Murder Capital se partager un plateau d’huitres.
Finie la « sieste », il faut déjà aller à la Scène de la Combe rejoindre Shame qui ouvre cette deuxième après-midi. Le public, encore clairsemé vu l’horaire et agrippé aux barrières, attend la venue de Juliette Armanet mais ne veut pas lâcher pour autant un centimètre aux fans de Shame, drôle d’ambiance. Tant pis, je rigole avec deux dames, venues voir la deuxième, qui me demandent qui sont ces garçons en leur répondant « ce sont de vilains garçons, attention, ça va valdinguer ». Je pense ne pas leur avoir menti. Pas intimidés pour deux pennies face à ces non fans, le groupe démarre très fort et donne comme à son habitude un show électrique et puissant jusqu’à ce qu’un déluge mémorable au bout de 40 minutes vienne signer l’arrêt de mort de leur set. Shame part alors hilare devant le spectacle d’un public qui s’enfuit on ne sait où pour se protéger comme il peut. Joyeuse et surréaliste bérézina !
C’est rincée des pieds à la tête avec mes baskets qui font flic floc que je remonte tout le site pour me rendre à la scène opposée voir The Murder Capital qui démarre déjà après ce bref mais intense orage. La chaleur et l’humidité sont alors au maximum, l’ambiance est parfaite pour aller écouter les Dublinois et se remettre de cette petite déception.
En Absurdie, si Elvis Presley et Ian Curtis avaient eu un fils, c’eût été assurément James McGovern, leader beau gosse et charismatique de cette meute endiablée. Nos oreilles souffrent avec bonheur face aux riffs de guitare et aux coups de batterie puissants, emportées par la voix profonde du chanteur qui donne absolument tout de sa personne durant ce set sombre mais jubilatoire. Wow, quelle classe.
Épuisée par cet enchainement d’orages, je pars me ressourcer un peu, renonçant à découvrir la machine de guerre disco Juliette Armanet pour me reposer les oreilles avant The Smile, le nouveau projet de Thom Yorke et Jonny Greenwood de Radiohead.
C’est devant un parterre nombreux et curieux que le groupe plonge le festival dans une ambiance raccord avec le ciel alors, douce pastel mais pleine d’incertitude, oscillant entre chien et loup. Le trio vient défendre son nouveau projet, somptueux et exigeant. Le concert est superbe à l’image de l’album, entrainant l’adhésion des vieux fans de Radiohead mais tout autant l’indifférence ou le rejet des autres. En effet, pas sûre que The Smile convienne bien au format festival, coincés entre des groupes de post punk et des reines de french disco, face à un auditoire venu globalement s’enjailler, avec une qualité du son très discutable (c’était TROP FORT = bilan unanime du public). Joli moment avec un petit arrière-goût de déception. À revoir dans un autre contexte.
Les dernières lueurs du jour évaporées, voici déjà que s’annoncent Idles, parfaits pour me tirer de la torpeur planante dans laquelle m’avaient plongée The Smile. Un peu déçue par la performance des Bristoliens l’hiver dernier à Lyon au Transbordeur face à un public très œuf mollet, j’attends beaucoup de leur concert ce soir.
Heureusement, le groupe a les conditions idoines pour faire un carton. Ultras en forme (l’effet des huitres ingérées à 14h ?), nos Idles prennent à bras le corps un public bien décidé à en découdre. Les titres déjantés s’enchainent à perdre haleine entrainant une explosion de plaisir enragé chez des spectateurs pas là pour jouer les figurants et pogotant à qui mieux mieux. La folie générale me gagnant aussi, je rêve devant les froufrous du guitariste Mark Bowen de piquer à Laura Ingalls sa robe légendaire. Bref, vous l’aurez compris, les dieux étaient de retour à La Combe à la Serpent et la fête, orgiaque, pour conclure en apothéose ce décidément très bon festival.
En effet, un train le lendemain à 5h40 m’interdira de poursuivre davantage ces agapes dijonnaises et c’est sur les notes du réchauffé mais bien tiède Toniiiiight i’m a rock n roll staaaar que je m’enfuirai hilare retrouver ma navette. Quel toupet ce Liam Gallagher tout de même !
Un grand merci à Lara Orsal et Jeanmi pour m’avoir permis de vivre ces deux passionnantes journées et un petit clin d’œil en guise de conclusion à la plus jeune fan de Idles et The Murder Capital qui est restée au premier rang, à fond, sur les deux concerts malgré les orages et le pogo, entrainant l’admiration du public et de The Murder Capital qui, très gentiment, lui offrirent les baguettes du batteur. Queen of VYV !
VYV Festival – 11 et 12 juin 2022 – Dijon
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Image bandeau : Idles au VYV Festival – Dimanche 12 juin 2022 ©V.Arbelet