[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]U[/mks_dropcap]n corps maquillé de noir, des fougères, une biche puis un rugissement humain. La première scène de du film réalisé par Matt Ross nous plonge dans l’univers étrange d’une famille spéciale, où l’aîné de la fratrie doit tuer un animal et dévorer son foie pour devenir un homme.
Captain Fantastic, c’est donc l’histoire d’un père, Ben, qui élève ses six enfants reclus au cœur d’une forêt nord-américaine de façon presque militaire. Entraînements sportifs chaque matin, programmes scolaires poussés, musique, travaux manuels, chasse… tout est fait pour qu’ils deviennent des rois philosophes capables de survivre dans la nature. Ce mode de vie totalement alternatif va être remis en cause à la mort de leur mère. Le père de cette dernière refuse que la famille assiste aux funérailles, car il s’oppose à l’éducation radicale de ses petits-enfants et aux convictions de Ben. Les enfants vont donc convaincre leur père de se rendre à la cérémonie célébrée dans une église du Nouveau-Mexique pour réaliser les souhaits du testament écrit par leur mère, Leslie (et accessoirement bouddhiste). Commence alors un road trip semé d’embûches à la fois drôle, fantasque et émouvant.
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]I[/mks_dropcap]l y a d’abord le choc avec la société américaine consumériste, sa population obèse, ses villes dédiées aux grosses voitures, son puritanisme… Puis les histoires de familles, avec leurs rancœurs, leurs différences, qui donnent lieu à des scènes extrêmement cocasses. Si à travers ce film Matt Ross nous délivre la critique d’une Amérique moderne toujours plus démesurée, il filme avant tout l’histoire d’une famille singulière, où l’amour immense d’un père pour ses enfants est dépeint avec beaucoup de tendresse. Cette phrase pouvant paraître totalement mièvre ne l’est pas dans le film, grâce à l’humour des dialogues et des situations. Le pathos n’est en effet pas placé au premier rang : les acteurs sont incroyablement justes et le scénario désopilant. Viggo Mortensen est absolument génial en père autoritaire et excentrique, et la bande qui l’accompagne tout aussi saugrenue, avec une mention spéciale au britannique George Mackay — alias Bodevan —, excellent en jeune homme socialement décalé.
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]N[/mks_dropcap]‘étant pas apte à parler de politique et de société, sujets ayant été souvent abordés et critiqués dans les articles concernant le film, je me pencherais plutôt sur l’image (dont je suis plus sensible.) Aussi importante que le thème, la manière dont sont filmés acteurs et paysages me paraît essentielle. Ici, elle est parfaitement maîtrisée. Les plans oscillent entre panoramas majestueux des forêts du Pacific Northwest et gros plans sur les visages, toujours avec une sublime lumière dorée et des couleurs chatoyantes. L’on se promène donc ainsi, entre micro et macro dimensions, entre décors surdimensionnés, naturels ou urbains, et détails loufoques, le tout bercé par des musiques de Sigur Rós, Dylan, Chopin ou Bach. Se baladant allègrement entre Little Miss Sunchine, Into the Wild et Moonrise Kingdom, ce film est une petite merveille d’esprit et de gaieté.
Sorti le 12 octobre, Captain Fantastic est à voir de toute urgence dans les cinémas les plus éclairés !