[mks_dropcap style= »letter » size= »52″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#214050″]U[/mks_dropcap]n auteur irlandais bilingue écrivant directement en français, c’est assez rare (Samuel Beckett exception faite). Dov Lynch se trouve donc en parenté avec Beckett, au moins pour cette particularité.
Mer noire est son premier roman aux éditions Anacharsis.
C’est un coup de maître.
Un livre d’à peine 140 pages mais qu’il est difficile d’oublier.
L’histoire est toute simple : Dimitris, ancien de l’IRA, vient de perdre son père. Ce père, vivant, le protégeait encore de l’organisation qui n’a jamais supporté sa défection. Dimitris se sait en danger. Il réagit plutôt que de subir et doit alors s’enfuir.
Il décide de rejoindre son frère Nico, ancien de l’IRA lui aussi, pour lui annoncer la mort de leur père.
Direction la mer noire et le village d’où est originaire leur mère.
En chemin, Dimitris va faire des rencontres. Certaines belles et douces, d’autres très violentes.
La langue de Dov Lynch est d’une simplicité désarmante.
Les faits, les avancées de Dimitris sont décrits froidement, sobrement mais cela colle parfaitement à l’histoire que veut nous conter Lynch.
Une vie sombre, un voyage où Dimitris traverse la guerre, des hommes en lutte contre d’autres hommes. Une odyssée moderne.
Dimitris continue d’avancer, quoi qu’il arrive. Seul contre tous. Peut-être seul contre lui-même.
Cette volonté de ne pas tomber dans le lyrisme fait que le lecteur lit dans un état second, complètement happé par ces mots simples mais si efficaces. Les phrases courtes donnent un rythme haletant au récit.
« Il y a du mystère là-dedans, il y a de quoi nourrir un homme.
Dimitris comprit alors ce que le Polonais voulait, il voulait connaître son histoire. Il dit qu’il n’y avait pas de mystère. Son père était mort, il venait pour annoncer la nouvelle à son frère et pour lui dire qu’il héritait de tout. »
Mer noire n’est pas qu’une histoire individuelle. Ce serait trop simple. Dov Lynch se penche sur l’Europe, ses habitants en lutte, les hommes en révolte. En cela, son oeuvre a une résonance très politique. Et le côté road movie prend tout son sens. L’histoire de Dimitris en vient à côtoyer celle de l’Europe et des hommes ou femmes qu’il va croiser.
Un extrait vous est lu ici (initialement lu à la radio suisse et mis à disposition sur le site officiel des éditions Anacharsis) :
Mer noire, Dov Lynch, Anacharsis, janvier 2015.