Si un jour vous rencontrez quelqu’un qui vous affirme que cette année 2015 fut pauvre en grands disques, dites lui de ma part qu’il est juste un crétin patenté doublé d’un idiot congénital doté de portugaises enlisées. Ok, j’y vais un peu fort mais, de fait, si on se borne à n’écouter que de la musette conceptualo-sensitive, on peut se dire que ce n’est pas cette année qu’un grand disque sortira des accordéons diatoniques d’Yvette Aimable. Pourtant, si on aime se faire déboucher les conduits auditifs à la toile émeri, 2015 est, objectivement, une grande année. Je vous en ai parlé il y a quelques mois, Akhlys a sorti jusque là le meilleur album de 2015 tous styles confondus, suivi de près par Dodheimsgard ainsi que, et celui-là je l’ai passé sous silence car un peu moins indispensable que les deux cités plus haut, The Heart Of The Netherworld de Desolate Shrine.
On pourra ajouter à ce duo le Exercises In Futility, nouvel album des Polonais Mgla. Le groupe, créé en 2000 par M au chant/guitare/basse et Daren à la batterie dans un premier temps puis Darkside, a au moins une particularité hormis celle de faire un Black Metal de grande qualité. A savoir que les Polonais ont du être piqués par des mouches tsé-tsé corses léthargiques quand il s’agit de trouver des titres à leurs chansons. Parce qu’objectivement, on peut pas dire qu’ils se foulent particulièrement. Pensez donc : sur chaque album, une chanson = un numéro. Un bien beau duo de feignasses, tiens. Autrement, Exercises In Futility est leur troisième album, arrivant trois ans après un With Hearts Toward None particulièrement excellent et plaçant le groupe sur la carte des grands groupes de Black Metal .
Outre ces considérations un tantinet futiles, il faut savoir qu’en matière de Black Metal pur, pour trouver meilleur cette année, il faudra probablement se lever très tôt. C’est bien simple, à l’écoute, Exercises In Futility fait l’effet d’une petite bombe. Petite bombe car, même si nous sommes en présence d’un Black très classique dans la forme, tendant par moment vers le progressif, les polonais parviennent, avec beaucoup de sueur et d’huile de coude, à être passionnant. Exercises In Futility happe dès les premières minutes de par une efficacité remarquable, toute en tension, abordable malgré tout car n’oubliant pas d’inclure de vraies mélodies dans leur métal, pesant mais parvenant à le rendre aérien. Bref, il est non seulement efficace sur tous les points mais étonne constamment, émeut même (le motif d’arpèges vers la 5ème minute dans la progression du second morceau est capable de vous coller des frissons) et ce sans artifices, sans effets de manche. Exercises In Futility est de fait très frontal, primaire mais non dénué de subtilités car toujours sur le fil entre bestialité et mélodie, parvenant à associer les deux comme rarement en étant plutôt accessible.
En résumé, l’album se poursuit dans cette veine, excellente, jusqu’au 4ème morceau. Arrive ensuite Exercises In Futility V qui, lui, éclipse, tous les autres morceaux de l’album et même ceux des autres disques sortis cette année dans la même catégorie. Comment expliquer le choc reçu à l’écoute de ce monument ? Je pourrais évoquer Omega Monolith De Fleshpress, ou bien l’intelligence des arrangements (l’utilisation du synthé notamment), ou encore cette tension quasi ininterrompue allant crescendo dès les premières mesures, sublimée par ces accélérations foudroyantes et bluffantes, ou, pour finir, ce riff hypnotique. Mais rien ne remplace une écoute pour convaincre de l’excellence de ces huit minutes démentielles qui achèvent de rendre Exercises In Futility absolument indispensable.
L’album se termine enfin sur un VI épique, impressionnant, parfait résumé de ce qui vient de se passer précédemment. Celui-ci commence doucement sur quelques arpèges puis se tend brutalement, monte crescendo en tension jusqu’à se conclure de façon plutôt abrupte, achevant de rendre cet Exercises In Futility au final pas moins indispensable que The Dreaming I ou A Umbra Omega. Un futur classique dans son domaine en somme, comme l’était presque leur précédent album, With Hearts Toward None, déjà impressionnant de maîtrise mais auquel il manquait l’étincelle de génie présente sur cet album. Tout, sauf futile.
https://youtu.be/YuOyDQ9j7mY
Sortie le 04 septembre chez No Solace et dispo pour le moment en cd chez Northern Heritage ainsi que chez Malignant Voices et à une date ultérieure en vinyle.
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C’est effectivement un excellent disque.