Il s’en passe de belles quand on n’est pas là, tiens. Suffit qu’on prenne un mois de vacances pour que certains en profitent pour piquer toutes les drogues planquées dans le bureau de la cheffe (qu’elle confisque régulièrement aux camarades Belges et Bretons de la team musicale) et sortir un truc de ouf pendant qu’on a le dos tourné. Un scandale. En revanche, ce que je ne m’explique toujours pas, c’est comment Stephen Lawrie, leader de The Telescopes, a pu avoir vent de toutes les substances à braquer dans le bureau de la cheffe. Je sais que le Webzine connaît une croissance de popularité exponentielle, que partout dans le monde Addict est cité en exemple, mais de là à se renseigner et venir tout rafler, il y a un pas que je n’aurais jamais imaginé Lawrie capable de franchir. Bon, en même temps, si ça peut lui permettre de sortir un album de la trempe de Hidden Fields (sorti le 07 août dernier), je veux bien lui laisser les clefs de la maison. Parce qu’en matière de disques baignant entièrement dans les psychotropes, j’en n’avais pas entendu d’aussi bons depuis les meilleurs Bardo Pond ou encore Spacemen 3
Hidden Fields ne comprend que cinq morceaux mais dès les premières secondes de You Know The Way, on comprend à quoi on a affaire. Guitares asthéniques (et, curieusement, tendues) sous psychotropes et voix monocorde, laconique, atone, lorgnant vers les Jesus & Mary Chain déblatérant un « you know the way, but you don’t know how » tout à fait à propos. Car de fait, si musicalement on a entendu ça des centaines de fois, ce Noise-Rock lysergique à la limite du drone (Absence et son absence de ligne musicale justement, s’incluant parfaitement dans l’atmosphère poisseuse du disque) se démarque des autres poseurs/suiveurs par une tension, une dangerosité, quelque chose de malsain et rampant qu’on ne trouve que dans quelques grands disques de ce genre. Si l’ensemble est très psychédélique, lourd, certains morceaux évoquent une sorte de Shoegaze qui ne parviendrait plus à se regarder les pieds du fait des émanations toxiques des spliffs surconsommés en quelques minutes par le personnel présent dans le studio (In Every Sense), d’autres amènent à la transe, de par leur rythme gourd, leurs guitares hypnotiques, leur façon unique et fascinante de faire du surplace dans un chaudron en fusion (The Living Things). A vrai dire, si on devait illustrer graphiquement Hidden Fields, ce serait un long tunnel glauque dans lequel on s’embourbe à force de vouloir avancer et surtout à l’issue duquel on ne ressort pas indemne ou alors complètement stone et totalement flippé. Imaginez-vous le Velvet du White Light qui, au lieu d’avaler les ecstasys, se serait mis à les fumer pour voir l’effet que ça pourrait faire, accentuant le côté parano et persécuté de sa musique ou alors le Psychocandy de Jesus & Mary Chain quasi amorphe mais devenu teigneux, incontrôlable après avoir chopé la rage et vous aurez une idée de ce à quoi peuvent ressembler ces trente cinq minutes de psychédélisme embrumé.
Le groupe n’en est pas à son premier essai, loin de là. Déjà actif fin des années 80 (leur premier album, Taste, sort en 1989) et ayant connu son apogée en 1992, Lawrie met son groupe en jachère une dizaine d’années et ressort depuis 2002 des albums laissant libre court à ses bas instincts, oscillant entre expérimentation électro/ambient, Post-Rock et Noise-Rock.
Aussi, si vous avez décidé d’arrêter les psychotropes mais que vous en recherchez toujours les effets, faites confiance à un gars qui a de l’expérience ( Lawrie, pas moi hein) et écoutez Hidden Fields vous m’en direz des nouvelles. Autrement, si vous aimez le psyché bien crade, dans son style, voici une des meilleures sorties de l’année.
Sorti chez Tapete Records ainsi que tous chez tous les bons dealers musicaux de l’hexagone depuis le 07 août dernier.