Ne voulant pas écrire l’élégie du désespoir, celle de ne pas pouvoir vivre et écrire à la fois, les jours se sont bêtement écourtés et s’ils s’élargissaient, il y aurait d’autant plus de choses à décrire en cette fin d’année. Depuis les collines vertes de Christchurch, ville au Sud de La Nouvelle-Zélande, Montana Rose a décidé de réunir ses compositions autour d’un EP. Sa musique conduit infailliblement vers des lieux peu communs, dans les cavités cachées de l’esprit et jusqu’aux tréfonds du coeur, une démarche thérapeutique.
Relier les émotions présentes avec celles du passé, c’est remonter à la surface des eaux après une plongée dans ses profondeurs, un fil qui traverse de pare en pare le système limbique.
Arpenter l’univers de Montana Rose, c’est se diriger infailliblement vers des lieux inconnus, où le moindre détail, sans pourtant n’en avoir jamais vu un seul, deviendrait familier. Un peu comme un voyage astral. Il y a des personnes qui s’avancent sur la scène du monde essayant de changer le sens du récit, en refusant ce vieil ordre séculaire avec une exigence de mutation que seul l’art implique. Ici, l’artiste ne se revendique d’aucune chapelle et rompt avec la fausse utilité de la réputation, préférant considérer son approche musicale comme un baume au coeur. Qu’est-ce qui donne la faculté d’agir fortement sur nos sens ? Prenez le temps d’écouter Heaven Weeps dont l’alliage du piano et de la voix exerce une fascination, un état de flottaison, là où le mystère ouvre une brèche invisible, nichée au creux d’un recoin immatériel. Loin du tumulte des villes tentaculaires, Montana Rose compose à partir de visions, de sensations, sans jamais user de fioritures, l’essence de sa musique est restituée à partir d’expériences vécues avant sa naissance. Ce qui induit la transmission d’un héritage qu’elle exprime dans une sorte de rêve éveillé. Seuls subsistent les échos du passé, résonnant depuis les cavités enfouies de la mémoire. De par son prénom, Montana est reliée avec la nature.
Autoproduit et n’étant pas destiné au départ à être publié autrement que pour quelques initiés, les 4 titres de Childlike sont la démonstration que la composition ne suit jamais le même parcours, et ne se limite pas à un couplet/refrain. En l’état, I know you’re not doin’ well sort du cadre onirique, bien que le piano et les nappes lointaines arrivent à se hisser en hauteur, avec la teneur des paroles, cette confidence est une offrande, les mots sont inscrits dans la peau, la parole se libère du corps pour atteindre le seuil de l’âme. Cette distinction est suggérée avec Small dont les motifs résonnent et se déploient à l’infini. Chaque mot prend tout son sens, chaque note est le support de syllabes. Au delà de ces descriptions, réside une sensibilité palpable même quand la guitare prend le relais avec l’émouvant Candy enregistré tel quel. Chaque titre est une transition, un passage de la jeunesse vers l’âge adulte sans pour autant que cela soit mentionné. Montana Rose parvient à émouvoir, sans le lyrisme de nombreuses chanteuses qui concluent leur répertoire en crescendos vocaux insupportables. Il n’y a pas le moindre mimétisme, ce qui est exempté de style musical. Ici, le rêve rejoint la réalité.
Montana Rose – Childlike
Autoproduction – 10 Décembre 2024