Il était une fois La Porcelaine de Limoges. Connu comme acteur de la série Dix pour Cent, et salué pour son premier film en tant que réalisateur Garçon chiffon (2020) dans lequel, déja il avait chanté, Nicolas Maury dévoile aujourd’hui 14 titres comme autant de sublimes bijoux Dior qu’il arbore souvent sur les tapis rouges. Des Prémices au Clap de fin, il raconte une histoire d’amour. Comme un film, comme un conte. Et c’est désarmant. Prince charmé au charme fou dès l’ouverture « il est des rencontres qui marquent à jamais, sois sûr que cet instant, je m’en souviendrais », c’est comme s’il était dans nos têtes, au moment pile du coup au coeur quand on tombe amoureux. On pense aux acteurs que Christophe Honoré fait parfois chanter, à Daho pour la finesse, au vilain petit canard d’Andersen et aux contes russes des cygnes changés en princes, dans l’habile tissage de ce disque entre images, rêves et douceur du coeur.
L’histoire dit que ces chansons et mélodies pop sont nées dans les forges d’artisans, catégorie M.O.F, c’est en effet le compositeur Olivier Marguerit qui a accompagné l’éclosion de Nicolas Maury chanteur. Mais également Doriand et Keren Ann, derrière l’espiègle Ou un baiser, « et si l’histoire s’arrête ici, qu’elle reste un secret dans nos vies, que voudras-tu pour t’en aller : une poignée de main ou un baiser? » et aux chœurs. Les fées délicatesse et élégance s’étant penchées sur son berceau, la plupart des textes de Nicolas Maury sont aussi signés Shanti Masud (par ailleurs réalisatrice, de clips et de courts-métrages notamment) et c’est un enchantement. Les cordes et les pianos semblent chanter tout seuls, les chœurs portent le poids des mots pour les rendre légers, entre film musical et comédie chantée, c’est un disque spectacle, un disque où poser les larmes d’un coeur blessé.
A ma fenêtre le matin adresse au quatrième mur parle encore d’amour, d’entrer en chanson comme en religion, en légèreté. Lumière et douceur sont les deux bagues aux mains de Nicolas Maury. Les sentiments comme de petits poissons venus à la surface de morceaux-rivières, sont là pour accompagner les états de l’âme (la griffure de l’enfance dans Porcelaine de Limoges), ou frémissent (« j’avais presque oublié ce sentiment farouche d’un inconnu qui vous parle mais l’envie qu’il vous touche, je sens quelque chose en moi pousser comme une fleur, arrose-moi de ta voix et viens cueillir mon coeur » dans Prémices), s’emballent (ode à la drague et à la danse pour princes et princesses de la nuit dans Gentleman), explosent (« ta peau comme une matière de joie, ton regard sur moi c’est une planète qui tournoie » dans Tout ou « avec lui je veux me perdre, goûter des parfums superbes, chanter ma joie d’être au monde, vibrer à chaque seconde » dans Avec lui ) et conduisent celui qui écoute à croire reconnaître le titre suivant au fil du disque. N’est-ce pas la victoire d’un morceau que d’être déjà reconnu, fredonné, adopté, avant même d’être écouté ?
Nicolas Maury dit « t’écouter parler et te regarder vivre, c’était sublime (…) j’ai peur de ma vie d’avant toi » et d’autres mots parfaits pour dire au revoir quand l’amour s’en va, et s’il est brillamment parrainé pour naître en chanteur, il porte seul le costume qu’on devine de soie. Il lui va comme une robe couleur de temps. Et on a hâte de le voir sur scène habillé de ces mots si délicats.
La Porcelaine de Limoges – Nicolas Maury
Parlophone, 20 Janvier 2023
Image bandeau : Elina Kechichova