Les Editions Sonatine, depuis plusieurs années, ressortent des tiroirs des livres plus ou moins passés inaperçus.
Les formidables Shane Stevens avec « Au-delà du mal », Charles T Powers « En mémoire de la forêt » ou encore les livres de Robert Goddard.
Ces livres paraissaient dans le catalogue normal de Sonatine et cette année, changement, une nouvelle collection voit le jour : Sonatine + dont la vocation est de ne publier que ces textes oubliés.
Les lecteurs de la maison Sonatine sont habitués aux œuvres de RJ Ellory : « Seul le silence », « Vendetta » ou encore « Les anonymes ».
Après la petite déception « Les neufs cercles », paru fin 2014, ce mois de juin 2015 voit la publication de « Papillon de nuit ».
Mais pourquoi le faire paraître dans la collection Sonatine + ? Il s’agit en réalité du tout premier roman de RJ Ellory, paru en 2003 en Angleterre mais encore inédit en France.
Joie du lecteur qui pense retrouver le Ellory de « Seul le silence ».
Effectivement, nous n’en sommes pas loin.
Ce « Papillon de nuit » nous ramène à la nostalgie caractéristique des premiers romans d’Ellory. Une sorte de temps perdu de l’enfance, qu’on regrette forcément. En cela Ellory se rapproche de certains écrits de Stephen King, « Différentes saisons » exemple. Le parallèle n’est pas innocent et vous verrez pourquoi par la suite.
Daniel Ford est un enfant de Caroline du Sud. Son meilleur ami, Nathan est un jeune noir. Le roman d’Ellory prend place dans les années 60. Martin Luther King, la lutte pour les droits civiques sont souvent évoqués. Le racisme est omniprésent ainsi que la guerre du Vietnam. La prison, le couloir de la mort également.
Les premières pages dévoilent quasiment toute l’intrigue: Daniel est emprisonné, il a été condamné pour avoir tué son meilleur ami, Nathan. Tout tournera autour de cela.
Daniel, se faisant narrateur, raconte son histoire, l’histoire de sa vie. Quand il était libre, son expérience de la prison, des mâtons violents et persécuteurs, du prêtre qui le visite, son peu d’espoir d’une grâce, son attente de la mort et surtout ses souvenirs de Nathan. Tout ce qu’ils ont vécu, à deux, inséparables.
J’évoquais « Différentes saisons » de Stephen King, vieux recueil de nouvelles dont une sur l’amitié entre deux jeunes garçons : « Le corps » (adapté par Rob Reiner sous le titre « Stand by me ») et une autre sur la prison : « Rita Hayworth et la rédemption de Shawshank » (adapté par Frank Darabont sous le titre « Les évadés »).
La lecture de « Papillon de nuit » m’a sans cesse ramené à ces deux nouvelles. Comme si Ellory s’en était inspiré pour en faire un roman.
La nostalgie perçue dans « Le corps » se retrouve dans les propos de Nathan, ses regrets d’abord et son amour du temps de l’enfance quand Nathan et lui se sont rencontrés et ont en quelque sorte scellé un pacte à travers le partage d’un sandwich.
L’ambiance extrêmement glauque de « La rédemption de Shawshank » et de ses gardiens tortionnaires est aussi présente chez Ellory à travers un nouveau gardien, sorte de modèle de tous les hommes ne vivant qu’à travers la souffrance de leurs semblables.
Ellory mène son livre tambour battant, sans temps mort, s’amusant à truffer son récit de flashes-back.
Un « retour » en grâce pour un auteur capable du meilleur comme du plutôt moyen.
Un nouveau roman est annoncé pour août : « Les assassins« , roman définitif sur les serials killers selon Sonatine. Le sujet est alléchant. Suite en août donc.
Papillon de nuit de RJ ELLORY, traduit de l’anglais par Fabrice Pointeau, paru chez Sonatine Éditions.