Nous vous en parlions il y a quelques semaines, s’est déroulé pendant presque tout ce mois de mars, le Printemps des Poètes 2015. Addict a tenté de suivre pour vous l’évènement tant les propositions étaient nombreuses et vous donne un petit récapitulatif des meilleurs moments de cette année. On s’attardera d’ailleurs tout particulièrement sur l’un d’entre eux où la Poésie & la Danse étaient étroitement mêlées … Soirée organisée par la Maison de la Poésie de Nantes* en coproduction avec l’Université de Nantes et en partenariat avec le festival Concordan(s)e jeudi dernier …
En attendant, rétrospective sur quelques temps forts de cette édition 2015 … partout en France !
Pour cette nouvelle édition, le Printemps des Poètes a donc mis l’accent sur l’insurrection poétique illustrée par les poètes dadaïstes et surréalistes, les poètes de la Résistance, de la négritude ou de la Beat Génération… La manifestation, qui avait comme parrain Jacques Bonnaffé, proposait des milliers d’événements dans toute la France, dans les bibliothèques, librairies, cafés, théâtres, écoles ou encore les hôpitaux … Pour cette 17ème édition, le Printemps des poètes rendait aussi hommage à Luc Bérimont, poète de l’Ecole de Rochefort, pour le centenaire de sa naissance, ainsi qu’à Robert Desnos, poète insurgé, résistant et déporté, pour les 70 ans de sa disparition.
Le Printemps de la Poésie Arabe à l’Institut du Monde Arabe à Paris était à l’honneur également en ouverture de la manifestation. Cette soirée a permis de mettre l’accent sur la poésie arabe dans différents pays, avec Wissam Arbache, jeune interprète et metteur en scène, qui a réalisé et animé plusieurs rencontres avec des poètes syriens et avec les musiciens Saïd Moussnaoui et Vick Moan ainsi que les acteurs Reda Kateb, Wissam Arbache, Hala Omran, Jacques Bonnaffé…
D’autres propositions ont bien sûr eu lieu comme « On n’est pas sérieux quand on a 17 ans » donnant la parole à celles et ceux qui ont 17 ans en 2015 et les invitant à choisir « leur » poème préféré parmi une trentaine de livres de poésie classique et contemporaine ; le Bal poétique francophone animé par la Baronne de Paname qui a fait revivre dans les rues ou dans les lieux clos l’atmosphère du bal populaire pour un public au rendez-vous, avec les musiciens du Petit Bal de Poche et des comédiens qui ont dit et slamé à cette occasion des poèmes francophones. La poésie était visible aussi dans les espaces publics. Ainsi à Lyon, à la suite d’un concours de poèmes par texto et sur twitter, les poèmes sélectionnés étaient affichés sur les panneaux lumineux de la ville ; l’insurrection poétique était aussi partout dans les bus urbains les 13 et 14 mars derniers à Blois ou encore ce samedi grâce à une pluie de poèmes propulsée du haut des immeubles à Sète …
Les libraires étaient aussi bien sûr de la partie ! En partenariat avec les éditeurs, ils ont mis en valeur leur rayon poésie et ont invité des poètes à rencontrer le public. Ainsi se sont déroulées de nombreuses rencontres, des lectures et diverses animations autour de la poésie notamment à la librairie Vent de Soleil à Auray (56), les Yeux d’Elsa au Havre, Les Volcans à Clermont-Ferrand (63), La très petite librairie à Clisson (44), la librairie Olypique à Bordeaux qui organise le marché de la poésie (33), la librairie du Centre à Soissons (02), la librairie Le Tréguier (22), Librairie des Danaïdes à Aix-les-Bains (73), Librairie Brindefo’livres à Annecy (74)…
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La poésie & la Danse ou l’aventure d’une rencontre entre un écrivain et un chorégraphe …
C’est ce qui était proposé par la Maison de la Poésie de Nantes en coproduction avec l’Université de Nantes et en partenariat avec Concordan(s)e jeudi soir au Pôle étudiant. Cette soirée présentée par Marc Perrin et Bernard Bretonnière, mêlait ainsi Poésie & Danse. Addict y a assisté avec un public venu très nombreux !
©Maison de la Poésie de Nantes
Et c’est certainement Paul Valéry qui, déjà lors d’une conférence donnée en 1936 sur la Philosophie de la danse*, exprime et résume le mieux ce que l’on a pu vivre et ressentir pendant ce moment de rencontres singulières entre un auteur et un chorégraphe. Ceci donnant lieu à un acte artistique commun et inédit ! Car oui, la poésie et la danse sont loin d’être deux arts étrangers l’un à l’autre. Bien au contraire, d’après Valéry « La danse est tout simplement une poésie générale de l’action des êtres vivants : elle isole et développe les caractères essentiels de cette action, la détache, la déploie, et du fait du corps qu’elle possède un objet dont les transformations, la succession des aspects, la recherche des limites des puissances instantanées de l’être, font nécessairement songer à la fonction que le poète donne à son esprit, aux difficultés qu’il lui propose, aux métamorphoses qu’il en obtient, aux écarts qu’il en sollicite et qui l’éloignent, parfois excessivement, du sol, de la raison, de la notion moyenne et la logique du sens commun ». *Philosophie de la danse de Paul Valéry, édité chez Allia, 2015.
Ce fut donc trois duos « auteur/chorégraphe » qui nous étaient offerts à voir et écouter. L’osmose dans ce même désir commun de création entre les protagonistes étaient bien là. Ainsi nous a été certainement dévoilé ce qu’ils ont surpris, compris de ce cheminement de création, comme un prolongement original à leur propre univers.
©Maison de la Poésie de Nantes
Le premier duo à se lancer dans l’aventure était celui d’Antoine Dufeu, auteur au style souvent tranchant et acide et le chorégraphe américain Jonah Bokaer (plus jeune danseur à avoir intégré la Compagnie Merce Cinnuingham) dans une prestation appelée Museum of nothing*. Ce projet a été inspiré par I Like America and America Likes Me créée à la galerie René Block de New York, en mai 1974, par l’artiste Joseph Beuys. Pour cette performance, Beuys a vécu dans une cage avec un coyote sauvage trois jours durant. Dans leur pièce, Dufeu & Bokaer explorent des positions, des attitudes, des costumes mais aussi le rapport au sol ; ils proposent une appréhension de l’espace clos, des frontières et des relations avec le public. Cette performance est le symbole du lien entre deux continents, l’horizontalité et la verticalité, la nature et la vie, la nature et la mort…
*En partenariat avec le festival Concordan(s)e / www.concordanse.com
Extrait vidéo ici :
©Maison de la Poésie de Nantes
Iguana, Iguana était la deuxième performance proposée par des étudiants de l’Université sous la direction de l’auteur Anne Kawala & Nicolas Irurzun de la Cie Passage(s). Une magnifique performance énergique et colorée tant on sentait une réelle cohésion dans le groupe.
Passage(s) est une compagnie de danse contemporaine attachée à l’Université de Nantes. Dirigée par Nicolas Irurzun, elle regroupe des étudiants amateurs qui composent des créations présentées, depuis plusieurs années, dans divers festivals en France. La compagnie a travaillé avec Anne Kawala depuis novembre 2014 à la création d’une pièce entre danse et poésie.
Le site de l’auteur Anne Kawala, ici http://anne.kawala.free.fr/
©Maison de la Poésie de Nantes
Enfin, c’est avec force que l’auteur Philippe Malone et la danseuse Rita Cioffi nous ont présenté leur performance autour du texte Krach. Krach est d’abord une chute. Celle d’un corps individuel et social, celle de notre époque. C’est un texte de percussion poétique (faisant un bel écho à la thématique de ce printemps des poètes), un flot de rage qui se transforme en légèreté, un appel à la reconstruction d’un nous commun qui permette malgré tout une élévation. L’intensité et le rythme étant autant donné par la lecture de Philippe Malone que par les mouvements répétitifs et précis de la danseuse Rita Cioffi. Une très beau moment qui percute, bouscule par la pertinence et la puissance des propos et nous fait sourire (parfois grinçant provoqué par tant de vérité) !
Philippe Malone a vécu sous une dictature au Togo. Il veut combattre dans ses textes la normalité de la barbarie et la montée du fascisme. Sont abordés des thèmes intemporels comme la lutte pour le pouvoir, les rapports de force dans un groupe social, la guerre, et au travers d’eux, la place de l’humain.
Rita Cioffi est d’origine italienne. Après une solide formation classique et plusieurs collaborations, elle intègre la compagnie du Centre national chorégraphique de Montpellier. Elle fonde la compagnie Aurélia en 1996, qui réunit des artistes provenant de la danse, de la musique, des arts plastiques et la vidéo.
©Maison de la Poésie de Nantes
Une soirée Poésie & Danse qui mêlait magnifiquement intelligence à la sensibilité et on en redemande !
Pour en savoir plus sur la Maison de la Poésie de Nantes* & son prochain programme, c’est là http://www.maisondelapoesie-nantes.com/