Au palmarès de l’OVNI musical 2013, nous avions le lauréat Son Lux avec un troisième album Lanterns …
Ryan Lott, maître à penser dont l’œuvre expérimentale aura attiré quelques oreilles exercées à des années lumières des productions surfaites : Une petite machinerie inventive, des fabrications artisanales et aériennes pour un ensemble d’une créativité aussi épatante que méconnue du grand public. Point de tabous sur les titres qui jalonnent cette odyssée. On y croise des chœurs d’une richesse inouïe. Lost It to Trying, un titre qui, à lui seul, mérite les détours répétés. Appréhender alors les sursauts d’Easy et le miel d’un saxophone malicieux. Des ponctuations où se glisse une voix travaillée par des arrangements spatiaux. No Crimes et sa frénésie rythmique en contrepoids de compositions plus solennelles. Enough Of Our Machines qui se penche vers des ballades déchirantes et sublimes. Des collaborations inspirées pour couronner le tout. Bref, un halo lumineux venu nous éclairer en pleine nuit. Et dire que l’on aurait pu passer à côté …
Et la suite ?
C’est Bones qui nous arrive en ce début d’été 2015. A la première écoute on est déjà embarrassé. Trop de matière en fait. L’évidence qui n’était déjà pas de mise devient une étrangère oubliée. Autant le dire bien haut et fort, l’album est une performance datée dans les prouesses du XXIème siècle. A trop vouloir nous téléporter dans les arcanes pseudo futuristes d’une électro dite intelligente, je perds vite le fil. Orchestration déjantée déjà entendue ailleurs qui ne donne pas de valeur ajoutée au projet. C’est une déception évidente même si je ne veux abdiquer et porter un jugement trop hâtif à cette nouvelle collection…
Il me faut alors creuser un peu plus sans ce désir pour autant de m’y perdre via des relectures affinées allant jusqu’au détail chirurgical des strates qui composent chaque pièce du puzzle.
Serais-je aussi pinailleur que cet empereur assis sur son trône qui par le simple fait de sa naissance ose reprocher au génie absolu un opéra trop riche de notes ?
Ryan s’est associé à Ian Chang (batterie) et Rafiq Bhatia (guitare) pour un trio débridé de toute contrainte.
Change Is Everything avait amorcé la timide évolution vers des aspérités post rock biscornues. Toujours le même grain de voix syncopé, la même élocution exaltée au grand jour et pourtant les contours qui enveloppe la chose ne sont plus les mêmes lorsqu’ils pénètrent nos esgourdes (du moins les miennes)
Désormais trop sophistiquée et passée à l’eau du javellisant dubstep, la musique de Son Lux n’a plus de relief. Il lui manque le grain et le souffle du vivant. Les éléments essentiels qui donnent du sens aux enchevêtrements certes ingénieux mais terriblement barbants.
Si mon propos est quelque peu acerbe c’est que l’attente était grande. Trop sans doute. J’ai été charmé par les sonorités magiques de Lanterns, celles de Bones me laissent circonspect.
Il me faut alors réitérer mon labeur devant l’ouvrage en évacuant autant que possible mes premières impressions parasitées.
La lanterne qui nous guidait dans la nuit nous rend aveugle. Une cécité provoquée par des transitions abruptes, un millefeuille qui étend son vol au-delà des sphères galactiques (Flight)
You Don’t Know s’avère être le cousin extraterrestre d’un blues trop savant. Les machines éructent dans un tourbillon décalé.
La boucle est bouclée avec This Time qui voit un sample du titre d’ouverture surcharger une diffusion déjà abondante.
Après avoir purgé cette démonstration de force, il reste l’hypnotique I Am The Others puis les accalmies somptueuses de Your Day Will Come dont le dessein sera de redorer le blason de l’ami Ryan.
L’auditeur navigue alors vers une offrande qu’il a aura fallu débusquer avec peine. Nous pouvons alors apprivoiser les vibrations rythmées d’Undone. La persévérance des fans récompensée par un cœur qui renait, un univers qui devient plus audible pour ceux qui n’auront pas effacés de leurs tablettes un album à l’entame trop agressive.
White Lies continue la découverte d’un chant élégiaque qui vient tutoyer des mouvements digitaux. Plus on avance, plus les titres insufflent une certaine forme de résonance du réel.
Son Lux parvient à contourner les dangers du genre à l’exemple de Now I Want dont le martèlement glacé est embelli par des chœurs immenses « Now I want to be free » en leitmotiv incandescent …
Breathe Out et ses nappes synthétiques peuvent alors m’asséner un uppercut …
Mince ! Et si j’avais initialement tort ?
La réponse à cette question est chez votre disquaire à partir du 22 juin 2015.
Ah oui, là il va falloir le remettre, encore et encore… Impossible qu’un morceau comme Flight ne finisse pas par taper dans l’oreille de quelqu’un qui a apprécié, par exemple, Lost it to trying 😉
De mon côté Change is everything ne m’avait pas emballé (trop musclé, je pense), mais cet album me comble encore une fois complètement !