La copieuse tournée française de Tindersticks, qui vient de se finir fin novembre à Brest au Quartz est la parfaite occasion pour revenir sur Soft Tissue, le quinzième album du groupe légendaire de Nottingham. On en profite dès maintenant pour rappeler que la « bande à » Stuart A. Staples repartira sur les routes l’année prochaine avec en particulier un incontournable détour par La Salle Pleyel en mars prochain.
C’est d’autant plus facile de relier concert et disque que leur petit dernier est bien sûr au centre de leur prestation, seul le dernier morceau de Soft Tissue, le pourtant magnifique Soon To Be April n’aura pas l’honneur d’une version live.
Alors que Soft Tissue bénéficie de superbes accompagnements de chœurs, de cordes et de cuivres, donnant une chaude couleur Northern Soul à l’ensemble, les Tindersticks jouent en rang serré, autour de leur charismatique leader, magnifique avec son inamovible chapeau. Quelques bandes viennent en effet compléter les prestations de Stuart et de ses tout aussi classes compères, les fidèles David Boulter et Neil Fraser ainsi que le bassiste Dan Mc Kinna et le batteur percussionniste Earl Harvin, ce dernier arrivé en 2010 pour Falling Down On A Mountain .
Depuis cette époque, le line-up est stable et pourrait même donner le sentiment que Staples considère qu’il est dorénavant à la tête d’un nouveau groupe et particulièrement fier, à raison, de son dernier bébé, Tindersticks n’ira pas nous jouer de titres antérieurs, au grand regret des fans de la première heure, à l’immense Something Rain, ici à l’honneur avec de superbes versions d’A Night So Still ou Slippin’ Shoes et un Medicine à frissons.
Le reste de la setlist ira piocher du côté de The Waiting Room, un How He Entered pour nous mettre dans l’ambiance en ouverture et No Treasure But Hope, leur très bel album de 2019, Pinky In The Daylight et For The Beauty pour..finir en beauté.
Ailleurs, le quintet nous rappellera qu’il est passé maître en compositeur de musiques de film, pour Claire Denis bien sur avec une très jolie version de Stars At Noon mais aussi avec un Willow de très haute volée, même sans la présence de Robert Pattinson.
Leur avant-dernier album, le plutôt expérimental Distractions sorti en 2021 ne sera pas oublié avec The Bough Bends et une belle reprise, une spécialité des Tindersticks depuis plus de 30 ans, du Lady With The Braid de Dory Previn.
Nous arrivons donc à ce tissu mou, qui nous donne à retrouver nos Tindersticks préférés en grande forme; Stuart A. Staples chante toujours aussi divinement bien entre douceur et profondeur, chaque morceau est beau et délicat, à commencer par New World, premier single issu de l’album dont les cuivres et les chœurs emballent une mélodie soyeuse.
Le groupe ne révolutionne pas sa formule, mais au contraire, la magnifie, part de sa chamber pop pour y glisser quelques variations soul, jazz voire funk comme sur les petits bijoux que sont Don’t Walk, Run et Turned My Back. Nancy, encore plus belle sur scène, est une étrange ritournelle aux rythmes latinos, sur laquelle Earl Harvin fait des merveilles et Staples touche au sublime par la charge émotionnelle qu’il fait passer en chantant tout simplement « Nancy, Nancy, Answer Me« .
L’émotion est encore là, avec Falling, The Light, toute en mélancolie, à peine susurrée, à peine effleurée et le tout aussi délicat The Secret Of Breathing, une lumière pale, vacillante, un respiration qu’on retient, voilà toute la magie de Tindersticks. Le groupe de Nottingham va encore plus loin, avec un des plus beaux morceaux de toute sa longue discographie avec le génial Always A Stranger, sommet de mélancolie, aux arrangements mirifiques, les cordes pleurent, la trompette de Terry Edwards sèchent leurs larmes.
Soft Tissue est encore un grand disque pour les Tindersticks, qui, malgré le temps qui passe, restent toujours aussi uniques et indispensables, il suffisait de voir leur joie et complicité sur scène pour être persuadé que cela durera encore longtemps !
City Slang – 13 septembre 2024