[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#2b9e9c »]L[/mks_dropcap]a Fondation Henri Cartier-Bresson propose en ce moment aux amateurs de photographie, l’exposition Traverser de Raymond Depardon, conçue par Agnès Sire, directrice de la Fondation Henri Cartier-Bresson, en étroite collaboration avec Raymond Depardon lui-même.
Les expositions de Raymond Depardon sont fréquentes, mais ce serait une erreur de faire l’impasse sur celle-ci, car elle nous présente cet artiste touche-à-tout, à la fois écrivain, photographe et réalisateur, sous un jour différent. En effet, l’écriture y a la part belle ici et met en lumière les photographies exposées. Plus qu’à une rétrospective sur près de soixante années de carrière, on semble assister ici plutôt à l’introspection de l’artiste sur son œuvre protéiforme et riche, en se promenant parmi une centaine de tirages, textes, films et documents de l’auteur.
On traverse ainsi l’œuvre de l’artiste, depuis ses débuts à la ferme Du Garet jusqu’à aujourd’hui, en suivant quatre chemins. Au premier étage, La Terre natale vient ainsi se confronter au Voyage. Villefranche-sur-Saône et Paris, respectivement ville natale et ville d’adoption, sont son port d’attache entre ses multiples déplacements. Le voyage, les allers-retours incessants ont fait de lui un expatrié de l’intérieur.
À seize ans, j’avais devant moi une de ces fermes merveilleuses comme il n’y en a plus aujourd’hui, et je suis monté à Paris faire la première de « À Bout de Souffle » en négligeant les photos que j’aurais pu faire chez moi. Je me suis rendu compte en regardant le travail de Walker Evans- que j’admire tant – que j’aurais pu faire avec la campagne de mon enfance l’équivalent du travail qu’il a fait avec la dépression des années trente aux États-Unis.
Le deuxième étage vient quant à lui interroger deux thématiques sur lesquelles Raymond Depardon a énormément travaillé durant sa carrière, fruits de ses nombreux voyages. La douleur rencontrée partout, filmée, photographiée, décrite inlassablement lors de ses nombreux reportages est apposée ainsi à L’enfermement avec lequel Raymond Depardon entretient un rapport complexe, presque obsessionnel.
Le photographe […]est peut-être un voyeur. Être un voyeur professionnel. Regarder le mal, la douleur de tous les jours. Celle du dehors ou celle d’ici.
S’il n’existe pas vraiment de la douleur, si la douleur est étrangère à la pensée, elle reste toujours entre silence et cris.
Même si l’artiste refuse tout pathos ou regard compassionnel sur ce qu’il observe et offre à voir, l’on ressort – trop vite tant le voyage est passionnant – tout de même bien chamboulé par cette traversée intime.
Voyager, et n’être rien du tout
Ni touriste, ni reporter
Ne chercher aucune performance
Ne chercher rien à prouver
Si vous voulez poursuivre le voyage, un ouvrage qui accompagne l’exposition est co-publié avec les Éditions Xavier Barral. Il propose une sélection plus large d’images, ainsi qu’un long entretien inédit entre Raymond Depardon et Agnès Sire.
Traverser de Raymond Depardon
jusqu’au 24 décembre 2017 – Fondation Henri Cartier-Bresson – 2, impasse Lebouis – 75014 Paris
Fondation Henri Cartier-Bresson – Facebook