[dropcap]F[/dropcap]antastique lecture de l’été, drôle et intelligente, le nouveau roman des éditions Agullo est foisonnant mais absolument jubilatoire. Il faut avoir en tête le contexte : la guerre en Irak, la violence, les frappes aériennes, les différentes factions s’affrontant, la ténacité des américains à trouver des armes de destruction massive, la survie, la faim.
À cela on ajoute un casting aux petits oignons : des irakiens décidés à rejoindre Mossoul pour y dénicher un trésor et sauver leur peau, un G.I. tellement stupide que ça tient du génie, un tueur druze redoutable gardien d’un secret millénaire, une femme fatale et un vieil alchimiste antipathique. Tous sont à la poursuite de la même chose, tous veulent la retrouver en premier, et n’ont pas peur de jouer des coudes pour y arriver (ou de la kalachnikov, c’est selon l’envie).
Dans Bagdad, la grande évasion, Saad Z. Hossain nous entraîne à un rythme soutenu à la poursuite d’un trésor, d’une énigmatique montre druze et d’une caisse de Skittles. Avec le souffle des grands romans d’aventures et un humour plus corrosif que les caisses de détergent utilisées comme monnaie d’échange, ce titre se classe directement comme un grand livre sur la guerre et son absurdité. Mais loin d’être uniquement une sorte de Grande Vadrouille potache au Moyen-Orient, Bagdad, la grande évasion surprend par des passages oniriques faisant écho à une mythologie orientale faite de djinns, d’esprits et de harpies, ainsi que des réflexions puissantes sur les communautés religieuses et les conflits entre différentes minorités.
Bien que le contexte soit extrêmement chargé et que l’auteur ne le minimise absolument pas, l’humour caustique à souhait insuffle de grandes respirations à ce roman à la cadence effrénée. Et puis, un roman dans lequel on peut à la fois rire, s’instruire, trembler, rêver et s’évader, je ne vois aucune raison de passer à côté.
» – Je crois fermement que cette montre contient le secret de l’unique chose après laquelle les Druzes courent depuis toutes ces années.
– Quoi donc ?
– Rien de moins que le vieux rêve des alchimistes, le secret qui permet de…
Mais Hoffman, flagada, perdait le fil.
– Super mec, marmonna-t-il. Vous croyez pouvoir m’alchimiser un sandwich ou quelque chose du genre. Je crève de faim. »