[dropcap]L[/dropcap]’Homme qui tua Chris Kyle, qui lui-même tua «aux alentours» de 255 êtres humains : c’est ainsi qu’on peut résumer un épineux sujet de l’histoire américaine, traité en BD par Brüno, le scénariste des sériesTyler Cross et Vintage and Badass, et Fabien Nury, le scénariste d’Atar Gull et d’Il était une fois en France.
Mais l’exercice de synthèse ne va pas au-delà, car la réalité est plus complexe. Bien moins linéaire, en tout cas, que le film de Clint Eastwood consacré à la vie «héroïque» du navy seal Chris Kyle dans American Sniper, sorti sur les écrans en 2014.
Symbole d’une Amérique fascinée par les armes, triomphante, outrageusement patriote et quelque peu arrogante, le récit porté au cordeau par Fabien Nury et servi par les illustrations acérées et précises de Brüno, ne s’arrête pas au parcours de Chris Kyle.
D’une part, il décortique la manière dont celui-ci a construit sa légende. D’autre part, il s’intéresse au désespoir et à la folie maladive d’un autre soldat, Eddie Ray Routh, dont les syndromes traumatiques d’après-guerre n’ont jamais été appréhendés à leur juste valeur, faisant de lui, quelques années après, en 2013, le meurtrier implacable de Kyle.
Tel un documentaire rondement mené, la bande dessinée manie avec intelligence les allers-retours dans le passé de Routh. Elle met aussi en avant les rivalités gonflées à la testostérone entre professionnels de la guerre, raconte les liens forts d’amitié entre le sniper et son copain Chad Littlefield, témoigne du combat post-mortem de l’épouse très médiatique et très éplorée de Kyle, infatigable militante du lobby des armes…
Les faits sont mis en lumière, sans parti pris explicite. Cela n’empêche pas les dessins de la BD de parler d’eux-mêmes. Comment ne pas être choqué.e de voir reproduits sur une double page autant de cercueils que de personnes tuées par Chris Kyle… Comment ne pas s’étonner du rôle joué par les médias, par la religion ? Comment imaginer que, face à la lente mais inexorable descente aux enfers d’Eddie Ray Routh, rien de durable n’ait été fait pour tenter de le soigner ?
Seule sa mère a crié à l’aide. Paradoxe de l’histoire, c’est elle aussi qui, voulant aider son fils, le placera entre les mains de Chris Kyle, dont le passe-temps favori était d’emmener sur un champ de tir d’anciens camarades de combat, mutilés ou blessés, histoire de les faire reprendre goût à la vie !
Chaque chapitre de l’album débute par une citation d’un film impliquant Clint Eastwood. Un clin d’œil à ce grand acteur et cinéaste, qui fut aussi l’artisan de films à la violence et au patriotisme exacerbé. American Sniper était l’un d’eux. Mais, visiblement, il n’avait exploité qu’une face de l’histoire. Moins reluisant, le côté pile s’avère pourtant très intéressant et riche d’enseignements sur cette Amérique «de la loi et de l’ordre», aujourd’hui incarnée au plus haut-niveau par Trump…
[divider style= »dashed » top= »20″ bottom= »20″]
[one_half]
L’Homme qui tua Chris Kyle de Fabien Nury (scénario) et Brüno (dessin)
Éditions Dargaud – mai 2020
[mks_button size= »small » title= »Site web » style= »squared » url= »https://www.dargaud.com/bd/lhomme-qui-tua-chris-kyle/lhomme-qui-tua-chris-kyle-tome-0-lhomme-qui-tua-chris-kyle-bda5328760″ target= »_blank » bg_color= »#f5d100″ txt_color= »#FFFFFF » icon= »fas fa-globe » icon_type= »fa » nofollow= »0″] [mks_button size= »small » title= »Facebook » style= »squared » url= »https://www.facebook.com/editions.dargaud/ » target= »_blank » bg_color= »#3b5998″ txt_color= »#FFFFFF » icon= »fab fa-facebook » icon_type= »fa » nofollow= »0″] [mks_button size= »small » title= »Instagram » style= »squared » url= »https://www.instagram.com/dargaud/?hl=fr » target= »_blank » bg_color= »#9B0063″ txt_color= »#FFFFFF » icon= »fab fa-instagram » icon_type= »fa » nofollow= »0″] [mks_button size= »small » title= »Twitter » style= »squared » url= »https://twitter.com/EditionsDargaud » target= »_blank » bg_color= »#00acee » txt_color= »#FFFFFF » icon= »fab fa-twitter » icon_type= »fa » nofollow= »0″]
[/one_half][one_half_last]
[/one_half_last]
[divider style= »dashed » top= »20″ bottom= »20″]
Image bandeau : capture de la couverture de la bande dessinée