[dropcap]R[/dropcap]oman ou enquête ? L’hésitation est de mise. Le journaliste et auteur David Le Bailly se lance sur les traces du grand frère d’Arthur Rimbaud mais nous prévient assez vite qu’il n’a pas trouvé grand chose et pourtant son ouvrage va nous passionner pendant 360 pages.
Alors oui, il a lu, beaucoup, il a retrouvé des gens de la famille, il a reçu quelques témoignages. Roman ou enquête donc ? Un peu deS deux sûrement mais ce qui semble indéniable, c’est la qualité de l’écriture de Le Bailly, son sens du détail, sa quasi passion pour les perdants et son investissement dans cette œuvre.
Il parle de Rimbaud certes mais il consacre quelques chapitres à sa propre vérité. Pages formidables de lucidité et d’engagement.
Étais-je le seul être au monde à m’intéresser à la vie de Frédéric Rimbaud ? David Le Bailly
Tout le monde connaît la légende d’Arthur Rimbaud, au moins son nom, voir quelques titres de poèmes. Peut-être sommes-nous moins nombreux à savoir son départ pour l’Afrique, son abandon de la littérature, ses métiers, notamment trafiquant d’armes. Encore moins nombreux certainement à avoir entendu parler des relations d’Arthur avec sa sœur et plus, avec sa mère. Quant à son frère aîné, c’est celui qui a disparu de la photo comme nous le montre la couverture du livre : Arthur Rimbaud net et précis et à sa droite une silhouette noire. C’est son frère, Frédéric dont David Le Bailly va nous conter l’histoire ainsi que celle de sa famille.
À Arthur, la gloire. À son frère aîné, le peu qu’il reste. Pourtant l’auteur nous conte une enfance complice, heureuse presque. Arthur et Frédéric sont comme des jumeaux. Ils s’aiment, se défendent l’un l’autre. Des différences apparaissent déjà. Arthur est brillant, Frédéric beaucoup moins mais il n’en prend pas ombrage, au contraire, il est subjugué par ce petit frère si intelligent. Ils supportent ensemble le départ de leur père, le caractère dominant de leur mère, le décès d’une petite sœur et s’occupent d’Isabelle, le sœur qui reste et survit.
C’est l’âge adulte qui va les séparer. Et surtout leur mère, Vitalie Cuif qui va jusqu’à se déclarer veuve quand son mari la quitte. Ça donne une petite idée du personnage.
Une mère connue dans la région pour son sens des affaires aiguisé et sans pitié. Une mère qui va porter son Arthur au pinacle et ne donner que des miettes à Frédéric. Et encore des miettes, c’est exagéré.
L’autre Rimbaud va donc tourner autour de ces histoires familiales terribles pour Frédéric qui subira toute sa vie le joug de sa mère puis celui de sa sœur. Mais tout perdant qu’il est, il se révoltera quand l’injustice est trop grande.
Ce pauvre Frédéric a sa mère qui lui fait du mal, il aura aussi sa sœur par la suite. Une femme qui inventera avec son mari tout un tas de mensonge sur Arthur, afin de lui donner le beau rôle, passant sous silence son aventure avec Verlaine (ces choses-là ne peuvent exister dans l’esprit d’Isabelle) et spoliant Frédéric des droits d’auteur de leur frère.
Cette Isabelle parlera beaucoup, à tort et à travers, de son frère célèbre. Frédéric restera silencieux, toujours. C’est à ce silence que rend hommage L’autre RImbaud.
L’histoire de Frédéric, et aussi celle d’Arthur, ce sont des histoires de silence. Celui de l’enfance, quand, chaque matin, ils s’allongeaient sans rien dire dans une barque de tanneurs, en contrebas du collège de Charleville. Ou celui qu’ils opposèrent, une fois adulte, aux admirateurs, aux biographes, aux journalistes. Ils se sont tus, et d’autres ont parlé à leur place. Le silence est une musique, il s’écoute; encore faut-il tendre l’oreille.
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L’autre Rimbaud de David Le Bailly
L’Iconoclaste, août 2020
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Image bandeau : Portrait de l’auteur par Alcock fourni par les éditions de l’iconoclaste