20/12/2002
Kdo achetés, empaquetés = mission accomplie.
Pour continuer sur ma lancée, j’ai retrouvé le bodybuildé de la piscine de la rue de Pontoise. Après ce que je l’avais allumé la dernière fois, il n’a pas mis longtemps à me brancher. Pas le coup du siècle mais le mec est plutôt bien pourvu et son petit appart sous les toits donnant sur la Seine plutôt sympa. Surtout, je pars la libido un peu apaisée.
Dernier jour de boulot cocasse. Le déjeuner de Noël très arrosé a mis des couleurs aux joues de Carole. Assise face à elle, Aurélie, également un peu pétée n’était pas discrète. En faisant négligemment tomber ma serviette, j’ai pu voir son pied sous la jupe de Carole. Je ne sais pas pourquoi, j’en ai ressenti une pointe de jalousie. Pourtant, Aurélie n’a jamais été ma maîtresse si ce n’est occasionnellement (« l’occazione fait la cochonne », comme disait un boyfriend d’Ibiza). En partant, elle m’a pourtant branchée pour une des fameuses soirées d’une amie (Lola ? Lila ?) pour le nouvel an. Je me vois assez mal partouzer avec Carole. A voir donc.
21/12/2002
Mon père est en grande forme. C’est un plaisir de le voir au milieu de la famille de Christine. Plus conviviale et simple que nous autres n’avons jamais été. Il regrette juste que Mado ne soit pas là. Et ses petits-enfants. Quand Christine est entourée d’une ribambelle de minus, il aimerait pouvoir profiter des deux seuls siens, on le comprend. Quoi que pour ma part, ils ne m’ont pas manqué. J’adore ma sœur mais j’ai parfois l’impression que ce que j’aime en elle appartient au passé. Vieux débat.
22/12/2002
Longue balade de bord de mer avec papa et Christine. Un excellent thé dans une librairie salon de thé. Mistral sec, froid, et en même temps, leur bien-être à tous les deux est tellement irradiant que je me sentais ouatée. Il y a bien longtemps que cela ne m’est pas arrivé.
Veille de fête et de dimanche oblige : tout le département est à l’hyper, remplissant des chariots de pains ronds de seigle prédécoupé, de tranches de saumon fumé sous vide, boîtes de marrons glacés, rouleaux de papier pour empaqueter des dizaines de voitures téléguidées, jeux de société, Harry Potter dernière version, paniers de savons et bains moussants.
Christine parvient sans trop d’encombre au miel, doit renoncer aux steaks de thon vu le canevas de chariots dans lequel il faudrait se faufiler, profite d’une trouée inattendue pour attraper cinq baguettes et deux gros campagnes, et sprinte via le rayon désert de nourriture casher jusqu’à une caisse. C’est pas gagné, vu la queue, mais on sait, elle comme moi, qu’on vient d’échapper au plus fort du courant. On remonte un affluent.
La caisse puis la bagnole. Et sortir de là.
21H50
Dans ma petite chambre, avec ces vieux bouquins qui traînent sur les rayonnages d’une bibliothèque branlante. Et cette mémoire de mon amour, de mon insouciance… Avec Lex nous occupions cette même chambre et l’étroitesse du lit nous fournissait tous les prétextes pour nous frotter un peu plus l’un à l’autre. Je revois tout, comme à chaque fois, mais je ne pleure pas. Je me déteste plutôt. Pourquoi encore revenir sur ces vieilleries. A l’heure qu’il est, Lex doit être en train de baiser sa femme en silence sous le sapin, la porte de la chambre du môme ouverte, on ne sait jamais.
Je n’ai pas répondu à Goethe, mais il ne m’a pas relancée pour autant. La trêve des fêtes pour toute personne mariée ?
23/12/2002 – 10H20
Kevin, le cousin américain mormon, est arrivé avec, surprise, sa promise, une Américaine aux cheveux qui rebondissent sur ses épaules comme dans une pub de shampoing. Elle ne parle pas un mot de français mais n’est pas avare quand il s’agit de sortir ses grandes dents pour en faire des sourires.
17H05
Bon, c’est vrai, quand je l’ai vu avec sa blonde, j’ai cru que Kevin était passé au plan pantoufles-sex-once-a-week. Mais : soit il s’emmerde déjà profondément avec Colgate, soit il n’a juste rien changé à sa vie – suivant sa queue, dans la direction qu’elle lui pointe.
Walk this way.
C’est l’heure de la sieste dans la maisonnée, un grattement à ma porte et Kevin entre, fermant d’emblée le verrou. His goodlady is sleeping. Le sujet comment tu vas depuis la dernière fois s’épuisant, on passe aux retrouvailles du corps. Kevin fait de la planche à voile dans les trois heures par jour, il est du genre galbé. Le contact de son torse me met immédiatement en ébullition. Kevin a les doigts vicieux. Il aime tourner autour des choses, les effleurer, les titiller, les irriter. Je me retiens pour ne pas crier. En fait, je me rends compte que ça fait des semaines que je n’ai pas bien joui. Je dégouline, que j’en ai presque honte. Et quand enfin je prends sa queue dans ma bouche, c’est avec une espèce de soulagement, comme si je savais qu’enfin j’allais être satisfaite, totalement satisfaite. L’empalement vaut le détour, ma chatte remplie, les mains expertes m’excitant les seins, pelotant généreusement mon cul. Orgueil ou illusion, j’ai le sentiment qu’il ne baisera jamais si bien la toute-en-dents.
24/12/02 – 15H30
La totale de Noël : préparation du chapon, épluchage collectif de multiples légumes, courses de dernières minutes. Les enfants sont excités au possible mais Alexa, l’une des filles de Christine, réussit assez bien à les canaliser en organisant des jeux.
Au CFJ, y avait une fille comme ça, Carine, le genre déléguée de la classe depuis qu’elle est née, organisant tout de la soirée au week-end sportif en passant par des sorties culturelles. Pleine d’idées, toujours partante… Et toujours seule. Alexa est bien accompagnée de son mari mais quand on voit le temps qu’il passe dans ses coups de fil à Madrid, Recife, Porto Alegre ou Valence (il fait dans l’import-export de matériel informatique), on peut se demander si elle n’est pas de la trempe de Carine. Sexuellement, en tout cas, je l’emmènerais bien avec moi dans une de mes virées. Elle est assez bombasse (quand elle ne s’occupe pas des mômes elle fait des longueurs à la piscine municipale) et un peu arrangée, elle doit être terriblement canon.
17H18
Toujours mignon, et sans arrière-pensée, Kevin m’a ramené un petit joint d’une herbe qu’un de ses copains fait pousser sous le soleil de la côte Ouest. On a fumé sans même se toucher. C’est pas que l’envie manquait mais Émail-diamant pouvait surgir à tout moment.
Longue discussion avec Christine, qui s’inquiète de ne pas me voir recasée depuis Lex. J’ai pris mon air bonne fille, pas inquiète, fataliste et convaincue au fond, que le prince charmant était déjà en chemin. Je n’ai berné personne.
25/12/02 – 04H50
La totale de Noël (bis) : cadeaux sous le sapin, « oh ! », « ah ! », à l’ouverture des paquets, enfants effondrés au milieu des papiers cadeau deux heures plus tard, bûche fondue dans les assiettes.
Les coulisses de Noël : échauffés par notre tête à tête stérile de l’après-midi, plusieurs échanges furtifs dans la cuisine, au moment des paquets. Alors que je ramasse un bouchon de champagne, je me rends compte qu’il bande sous la nappe. Je le caresse au-dessus du pantalon. Il est éméché, tout le monde l’est : j’en profite.
Plus tard, dans le couloir vers les toilettes, il me coince contre le mur, sa main, sous ma jupe, franchement, sa langue dans ma bouche. Nous manquons d’être surpris par un môme. Je retire ma culotte dans l’éventualité qu’on se recroise… La soirée n’en finit plus. L’espoir renaît quand Portail-d’ivoire tombe de sommeil et d’alcool. Puis les uns après les autres, jusqu’à Kevin qui fait mine de monter se coucher en même temps qu’Alexa.
Je suis bien trop excitée pour ne pas jouer les pensionnaires. Je tourne dans ma chambre, une BD, un Libé. Soit il s’est effondré lui aussi et je serai bonne pour me calmer toute seule, soit je ne me suis pas gourée et il va venir. J’ai une sorte d’instinct pour les hommes, en tout cas pour les hommes engagés (peut-être développé après ce que j’ai enduré avec Lex). Je ne suis donc pas surprise quand Kevin passe la porte.
Nous n’échangeons pas un mot. Il sort sa queue, soulève ma jupe et me prend sans préliminaire, ses yeux dans les miens. Calmés. Nous fumons, il a le bon goût de ne pas me parler de sa promise, mais de planche à voile, des concours qu’il fait, de son boulot d’animateur de plage. On remet ça juste après et il me dit avant de partir, que c’était la dernière fois, qu’ils prennent un avion demain pour Paris. Je me garde de lui dire que moi aussi. Je suis pour les happy ends.
19H50
Fatiguée de ce périple dans le Sud. Contente pourtant d’avoir vu mon père et Christine heureux. Et du bon temps pris avec Kevin. Moins pensé à Lex que les autres années à cette période. C’est donc possible…
Un mail de Laure me souhaitant un joyeux Noël. Et de Nico aussi. Bizarrement, je rêve de lui en ce moment. Ça faisait combien de temps que je n’avais plus de nouvelles ? Sept, huit mois ?
C’est ça, Nico, joyeux Noël. Et bonjour chez toi.
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« Louna : sexe, vices et versa » est un texte de l’écrivaine et journaliste Agnès Peureu écrit en 2005.
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