[dropcap]P[/dropcap]our toute personne ayant fréquenté de près ou de loin l’œuvre littéraire de Mathieu Riboulet, commencer la lecture du livre Les Portes de Thèbes, paru aux éditions Verdier, procure une émotion rare. Celle de retrouver l’écriture d’un homme disparu en 2018 et de s’y lover pour y trouver le même réconfort ressenti précédemment. La volonté de Mathieu Riboulet n’était pas d’écrire des livres réconfortants. On y trouve cependant une clarté et une lumière atypiques. Les Portes de Thèbes est aussi surprenant que beau. Il n’est pas testamentaire et la mort n’y rôde pas plus que dans ses autres œuvres.
Pourtant, on pourrait croire ce texte écrit d’un au-delà, décrivant avec force les éclats de l’année deux mille quinze (comme l’indique le sous-titre), année charnière dans la vie personnelle de Mathieu Riboulet avec le début de son cancer et, plus largement, d’une grande partie des Français avec les attentats de Paris. Il est évident que cette année restera comme une lourde pierre noire en chacun de nous.
Dans Les Portes de Thèbes, l’écrivain l’évoque avec lucidité et emprunte à l’imaginaire eschylien (et en particulier à la pièce Les Sept contre Thèbes) dans une impudeur délicate où il met en commun son drame personnel et celui de tout un peuple. Il n’y a pas volonté de choquer mais plutôt d’évoquer la vie et le désir qui anime chaque être.
Le diagnostic de mon père lui a été livré cinq jours après l’attentat du World Trade Center, le mien trois jours après qu’une brochette de sept marioles a laissé cent trente-sept cadavres sur le sol de Paris, dont les leurs, le treize novembre deux mille quinze. Mathieu Riboulet
On retrouve aussi dans Les Portes de Thèbes un regard géopolitique sur la situation du Proche et du Moyen-Orient. L’écrivain retrace l’histoire de ces pays où l’ingérence occidentale a mené aux drames que vivent les populations. Ce même regard engagé, nous l’avions déjà lu dans Prendre Dates, co-écrit avec l’historien Patrick Boucheron.
Ce qui bouleverse dans Les Portes de Thèbes est la proximité de l’intime et du politique. Nous pourrions être offusqués par le désir sensuel imaginé par l’auteur vis-à-vis des terroristes de 2015. On saisit pourtant la portée bienfaitrice d’un tel excès.
Mathieu Riboulet est mort et ce texte témoigne de la pensée d’un homme profondément lucide et libre. La posture de grand tragédien qu’il se donne dans ce texte n’est que fictive puisqu’on y décèle la vérité de son sourire lumineux.
En accompagnement de ce livre, les éditions Verdier ont initié un livre collectif intitulé Compagnie de Mathieu Riboulet. Ce sont effectivement des compagnons qui écrivent avec sincérité ce que fut l’écrivain.
On retrouve ainsi Patrick Boucheron cité plus haut mais aussi Maylis de Kerangal, Michel Jullien, Marielle Macé ou encore Jean-Louis Comolli. Ces hommes et femmes qui lui rendent hommage deviennent un groupe veillant autour du feu Riboulet.
Ainsi, la parution du livre posthume et de ce livre collectif apportent une vitalité salvatrice à ce grand écrivain.
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Les Portes de Thèbes
de Mathieu Riboulet
Éditions Verdier – Janvier 2020
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