Leur titre Судно (Sudno) était devenu une sensation virale sur TikTok au point de concentrer une certaine attention des curieux vis-à-vis de l’alphabet cyrillique mais surtout accordant un regain d’intérêt au profit d’une cold wave transposée à l’Est du continent européen. À ce titre, je vous invite à lire ou relire le très intéressant article de ma consœur Claire Sixmonstre consacré à l’intriguant phénomène.
Pour revenir plus précisément à notre orchestre biélorusse, nous avions pu tester la qualité de notre platine grâce à deux premiers LP venus du froid (dans tous les sens du terme). Монумент (Monument) sorti en 2020 annonçait sans doute une novation avec un aspect moins marqué du côté de la tendance post-punk décharnée. Les plus fins observateurs pouvaient donc pressentir la montée en puissance artistique du projet. Pour autant, Molchat Doma (Молчат Дома) se faisait toujours taxer de groupe caricatural bien que pensionnaire d’un label dont la réputation n’est plus à faire en matière de style (Sacred Bones Records) et surtout, malgré un capital sympathie indéniable pour leurs déclinaisons de sonorités d’apparence grisâtre.
Justement, question couleur, la nouvelle expédition semble bien plus attractive. La pochette demeure axée sur le dogme d’une architecture imposante mais les teintes de la devanture osent désormais le sépia. Au niveau du contenu, c’est une véritable révolution. Aux beats pompiers répond une douleur qui n’est plus camouflée. La gravité demeure donc tout en s’enveloppant d’une prog’ électro bodybuildée. Imaginez l’esprit du sommet Violator revu et corrigé par une bande venue de Minsk dont le chanteur Egor Shkutko ne brade pas la suggestion d’un frisson vocal, moins monotone d’ailleurs mais tout aussi dramatique.
Il ne serait pas impossible de penser que la finalisation de Belaya Polosa sur les rivages ensoleillés de Los Angeles aura explicitement conféré bien plus de densité et d’aération à ce quatrième album. Molchat Doma dévore ici les tics des pulsations du début des 90’s sans omettre la bonne dose de réverbération. Globalement, la démonstration pourrait se perdre dans une surenchère d’un monde lugubre aux ornementations rococo. Au final, c’est davantage une attachante envie de remonter le temps qui pourrait nous envahir… la nostalgie du dancefloor batcave à l’horizon.