Le vent frais du renouveau souffle sur My Sweet Pepperland : un pays nouveau-né qui doit apprendre l’indépendance et l’application de la loi, de jeunes protagonistes bercés d’illusions et en prise avec un réel immobiliste, un genre enfin, le western mâtiné ici d’une fraîcheur étonnante, entre la fable noire et le conte bienfaisant.
La scène d’ouverture donne le ton : la pendaison amateur à un panier de basket, qui prête à sourire dans ses échecs, ne s’en finit pas moins sur un plan sordide. Ce mélange des registres va irriguer tout le film, qui sait prendre l’occidental par la main pour mieux le perdre dans un récit aux épices inconnues.
Trop saints pour être entièrement convaincants, nos deux protagonistes, hérauts de la loi ou de l’éducation, sont beaux, phares dans l’obscurantisme ambiant. Face à eux, les tenants du désordre établi ont des mines patibulaires, de gros flingues et peuvent, à l’image des frères de la jeune rebelle, faire preuve d’un ridicule assez risible s’il n’était aussi dévastateur.
Au charme insolite de cette communauté improbable, dans laquelle on croise des mères castratrices et des combattantes bimbo qu’on croirait sorties des vidéos télévisées de Jackie Brown, s’ajoutent les splendeurs d’une nature aussi vaste qu’humide, de montagnes verdoyantes dans lesquelles on se cache ou l’on se pourchasse. Fluide dans ses soubresauts, le film alterne des nuits aux portraits proches de Delatour avec des saillies de violence nimbées de la même superbe, comme ce combat entre chevaux qui préfigure la tuerie à venir.
Au vu des thématiques qu’il traite, My Sweet Pepperland est finalement d’une profonde intelligence : sans vouloir verser dans le pathos que son sujet impose, sans prendre le parti d’un réalisme brut, il parvient à évoquer le poids de la religion, le fanatisme, la paix fragile et l’étouffante tradition avec un sens rare de l’équilibre.
Car s’il est une chose à laquelle il ne renonce jamais, c’est la beauté, des femmes, de la nature ou d’un idéal, qui colorent cette fable d’un éclat tout à fait singulier.