Cinquante nuances de Grey, version italienne ? Érotisme soft à l’américaine ?
Non, surtout pas. Oubliez ! Ici, il s’agit d’une héroïne : Arianna. Magnifique femme-enfant à l’histoire tourmentée.
Elle a aimé jeune mais son histoire s’est mal terminée. Depuis, elle passe d’homme en homme. Hommes protecteurs qu’elle aime aussi mais dont elle dépend totalement: financièrement et moralement.
Tout au long des quelques 130 pages qui composent ce roman, Andrea Camilleri distille quelques informations sur Arianna, sa vie passée, qui elle est.
Arianna, femme-enfant ou femme et petite fille à la fois. Enfant au passé trouble et femme qui ne sait prendre soin d’elle même qu’à travers son « toutamoi » (il tuttomio) dont il serait cruel de révéler ce dont il s’agit tellement la surprise et l’effarement sont grands à la lecture. Ce toutamoi, refuge et sorte de double d’Arianna constitue le centre du roman. C’est le grand secret de cette femme, sa raison de vivre en quelque sorte et ce qui lui dicte sa conduite, la seule chose en quoi elle ait confiance.
Avec son mari, Giulio, elle a une sorte de contrat. Celui-ci, suite à un accident, ne peut l’honorer. Il comprend ses besoins et lui propose de jeunes hommes à la condition qu’elle ne les rencontre que deux fois. Pas plus. Jamais. Cet échange fonctionne jusqu’au jour où Arianna et Giulio croisent la route de Mario. Jeune homme à peine sorti de l’adolescence qui ne pourra résister aux charmes d’Arianna.
Le drame se met en place entre ces trois personnages en l’absence de Giulio.
Mario, jeune et impétueux, n’accepte pas les conditions des époux et se démène pour revoir Arianna. Tout est mis en place subtilement par Camilleri, jusqu’aux monologues d’Arianna tentant de se raisonner, de rester sage et de ne pas céder à Mario.
Camilleri installe dès le début de son roman une tension sexuelle quasi meurtrière à propos de son héroïne. Elle est un personnage tout à fait extraordinaire et rarement rencontré dans la littérature. Un mélange de femme forte, mante religieuse et de femme enfant désœuvrée, désespérée et aux pulsions incontrôlables.
Le drame est en route et ne se dénouera que dans les dernières lignes, absolument étonnantes mais finalement bien à l’image de cette femme.
Le toutamoi, d’Andrea Camilleri traduit par Serge Quadruppani, paru aux Editions Métailié, février 2015