[dropcap]C'[/dropcap]est un 25 juin en 1903 que naquit un certain Eric Arthur Blair, qui rendrait encore aujourd’hui de formidables services dans de nombreux ministères de l’éducation. Il n’y a pas de 25 juin sans que je pense à ce que serait ce monde sans la pensée de son alias, George Orwell, un peu comme une planète victime d’une pandémie qui ne disposerait pas de vaccins.
Mais voilà il y a une maladie fort répandue, une peste bubonique pour ainsi dire, pour laquelle George nous a laissé un merveilleux vaccin ! Il est petit, facile à injecter et on peut en prendre autant de doses que nécessaire (plusieurs doses annuelles sont évidemment recommandées) et les seuls effets secondaires enregistrés à ce jour sont des « effets primaires » extrêmement positifs.
La première fois où j’ai lu La ferme des animaux, ce fût un choc, le sentiment de tenir entre mes mains un ouvrage qu’il faudrait immédiatement imprimer à plusieurs millions d’exemplaires de manière à en doter chacune de nos chères petites têtes blondes, en laisser derrière les caisses de supermarché, dans les salles d’attente des dentistes et surtout, surtout, dans chacun des bureaux de tous ceux qui se targuent d’avoir la plus petite parcelle de pouvoir l’exercent.
Oui lire George Orwell et ce texte en particulier c’est un peu conserver sur soi une sorte d’antidote à la dérive autocratique, un vademecum de l’anti-pouvoir, une capsule de cyanure pour éviter même sans aucune torture d’être persuadé qu’on a absolument raison, bref une parcelle d’espoir dans un monde d’egos sur d’eux-mêmes et du bien fondé de leurs idées.
Alors voilà si à un moment, à une seule seconde de votre vie vous vous sentez chef de quelque chose (attention la maladie peut facilement se déclencher simplement si vous devenez chef de l’organisation de l’anniversaire de votre petite nièce ou chef de l’association des collectionneurs de cartes bleues périmées), si un instant vous éprouvez la plus petite certitude d’avoir absolument la seule vision exacte sur quoi que ce soit, si vous passez devant un miroir avec une sensation de gonflement de la poitrine, alors vite jetez-vous sur ce petit vaccin littéraire de toute urgence.
Et si vous n’êtes chef de rien, faites-moi plaisir, ce 25 juin, lisez ou re-lisez quand même La ferme des animaux.
Image bandeau : Source wikipedia