[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]H[/mks_dropcap]abiter le verre. Plonger dans la matière et sa transparence. Voilà l’ambition de la sublime danoise dans son dernier album, Citizen of Glass. Dès le premier morceau, nous sommes immergés dans le nouveau monde merveilleux d’Agnes Obel. Une introduction digne d’un film fantastique burtonien : des cordes distendues, un tambour itératif, une note électronique qui vous transperce par sa froideur nordique. C’est presque angoissant, surtout lorsque des halètements viennent se mêler à la mélodie. Les violoncelles entrent dans la ronde, puis la voix. Toujours la même, cristalline et puissante, cependant plus mature que sur les deux albums précédents. Obel grandit, et c’est de plus en plus beau.
Il y a toujours cette pureté romantique qui transparaît à travers sa musique, mais cette fois-ci, l’on ressent une exploration différente, plus sombre. Les sons s’imbriquent et se superposent, créant de multiples facettes. Telles des variations prismatiques, les notes se réfléchissent, les voix se reflètent. Le clip de Golden Green, réalisé par Jonas Bjerre, illustre la poésie évanescente qui exulte dans chacun des morceaux.
Dans un univers quasiment cinématographique, Agnes Obel nous décalque des décors minéraux et organiques, où la nature n’est désormais plus sa principale source d’inspiration puisque le nom de l’album fait référence au concept allemand du Gläserner Bürger, théorie sur la transparence d’un être et de son intimité. Le magnifique Familiar, premier morceau dévoilé au public, représente le tournant opéré par la musicienne. C’est éthéré, limpide, arrangé superbement. Tout comme ce qui suit.
Les morceaux oscillent entre le minimalisme gracieux (voix/piano/cordes), signature de l’artiste, et des assemblages plus complexes mais toujours subtils d’instruments acoustiques et de sons électroniques. L’interlude musical Red Virgin Soil précède la douceur de It’s Happening Again et de Stone. Ils sont suivis par Trojan Horses, la perle de l’album. Deux notes graves, des boucles de piano, des échos de cordes … Quelque chose de presque mystique, comme une terre sauvage que l’on survolerait sur le dos d’une créature magique … La féérie se poursuit avec Citizen of Glass, Golden Green, et Grasshopper, interlude clair-obscur. C’est Mary, ritournelle enchanteresse et vaporeuse, qui vient clore l’album avec délicatesse.
Avec Citizen of Glass (sorti le 21 octobre chez Pias), Agnes Obel explore de nouveaux horizons sonores, et laisse une fois de plus la beauté nous envahir.