[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff »txt_color= »#000000″]A[/mks_dropcap]lex Cameron va pouvoir sortir de sa longue phase de frustration. Prêt à sortir un deuxième album depuis 2014, il a du faire preuve de patience pour voir Forced Witness enfin sortir aujourd’hui. Le résultat est surprenant et confirme tous les espoirs placés en lui avec Jumping The Shark. Avec des références comme Prefab Sprout et The Blue Nile en tête, Forced Witness ne pouvait décevoir. Il nous a reçu avec Roy Molloy, deuxième membre du groupe (oui, Alex Cameron est un groupe !) pour nous parler cette longue ascension, de son ancien job de fonctionnaire traquant la corruption et de sa connivence musicale avec Brandon Flowers de The Killers.
Les personnes ayant adoré Jumping The Shark risquent d’être déroutées à l’écoute de Forced Witness. Musicalement le disque emprunte une direction plus mainstream avec des sonorités 80’s.
Cela ne t’inquiète t-il pas trop alors car cet album est attendu comme celui de la confirmation ?
Alex Cameron : Pas du tout. J’ai écris Jumping The Shark à 25 ans. J’en ai aujourd’hui 28. Je n’ai plus les mêmes envies. Mon travail consiste à composer de bonnes chansons, pas à m’inquiéter de ce que va penser le public.
Roy Molloy : Les gens seront déroutés tout en comprenant notre trajectoire.
Alex : Ce n’est pas un pugilat. On y retrouve le même état d’esprit.
Quels artistes 80’s vous ont inspirés lors de la conception de Forced Witness ?
Alex : L’influence majeure est Prefab Sprout. Pour la clarté de leurs chansons. Et aussi The Blue Nile, China Crisis. Dans un style différent, Leonard Cohen, Roy Orbison et Chris Isaac. Leur musique laisse s’exprimer des sentiments universels. C’est ce que je recherchais.
L’omniprésent Jonathan Rado de Foxygen a produit Forced Witness.
Comment vous êtes-vous rencontrés et pourquoi l’avoir choisi pour ce disque?
Alex : Nous recherchions un producteur professionnel tout en craignant qu’il rende notre musique impersonnelle. Jon nous avait offert ses services de lui même il y a quelques années. Ses talents à la production ne sont plus à prouver. C’est un mélodiste incroyable. En plus c’est un ami. Nous avons passé d’excellents moments avec lui pendant l’enregistrement.
Roy : Son studio s’appelle “Dream Star”, mais nous l’appelons le “Dank Tank” (Caverne sombre et humide ndlr). C’est à l’image du cerveau de Jonathan. Une sorte de Think Tank rempli d’idées noires (rire).
On retrouve de nombreux collaborateurs sur Forced Witness. Brandon Flowers de The Killers a co-écrit un titre et joué sur d’autres.
Ces sessions ont-elles été planifiées ou bien spontanées ?
Alex : Tout s’est fait spontanément. Il y a eu pas mal d’opportunités. Certains nous ont même contactés pour savoir si nous étions intéressés par une collaboration. C’était le cas de Brandon Flowers qui aimait beaucoup le premier album. Il était de passage à Los Angeles pendant que nous enregistrions l’album. On en a profité. Il nous a aussi invités à travailler chez lui à Las Vegas. C’était un des moment les plus intenses de ma carrière. Le regarder travailler est une leçon d’humilité. Nous avons composé un titre tous les trois. J’avais une idée en tête en arrivant. Il a emmené le morceau dans une direction que je n’aurais jamais imaginé. J’en suis resté bouche bée. Ces moments de communion parfaite sont rare dans notre métier.
Roy : C’est comme un athlète qui arrive à dépasser ses limites pour battre un record. Mais sans les drogues (rire).
Certains, comme Pavle & Ivan Vizintin étaient déjà présents pour composer avec toi sur ton dernier album.
Pourquoi te tourner vers d’autres personnes alors que tu es toi même capable d’écrire des chansons de qualité ?
Alex : C’est souvent circonstanciel. Je ne présente jamais une chanson à quelqu’un sans les paroles, la mélodie et un refrain. Je suis à l’origine de chaque titre. Tu sais j’ai mes limites. Je ne suis pas un très bon joueur de piano. Je compose avec cet instrument, mais je suis rarement satisfait du résultat. Je préfère me tourner vers des musiciens talentueux pour que mes morceaux bénéficient de leur personnalité. J’ai besoin de les entendre à travers eux pour savoir s’ils peuvent tenir la route. Si un collaborateur modifie suffisamment le titre sur lequel nous travaillons, je le crédite systématiquement. Contrairement à d’autres artistes, je n’ai aucun problème à partager mes droits d’auteur avec mes collaborateurs.
C’est peut-être la raison pour laquelle Forced Witnessed sonne comme un album de groupe ?
Roy : Nous avons eu plus de moyens que pour l’album précédent. C’est une des raisons qui nous a permis de collaborer avec plus de monde.
Alex : Je voulais avant tout que Forced Witness sonne humain. Après un album à l’ambiance clinique et synthétique je voulais me prouver que je pouvais réaliser de la musique qui respire. C’est une des raisons pour lesquelles j’ai refusé d’utiliser des boîtes à rythme.
L’attente entre la sortie de Jumping The Shark il y a trois ans (il a été réédité en 2016 ndlr) et Forced Witness n’a t-elle pas été trop frustrante ?
Alex : Je suis frustré depuis 2015. Lorsque Jumping The Shark est sorti, personne ne s’y est intéressé. Nous avions déjà un deuxième album prêt à être publié en 2014. Les titres étaient dans la même lignée. Il devait être mis en ligne gratuitement sur internet. A la dernière minute nous avons changé d’avis. C’est probablement ce qui nous a sauvés.
Roy : La patience à joué une part importante dans notre carrière. Pourtant nous sommes les personnes les plus impatientes au monde.
Du coup, Forced Witness vous a demandé combien d’années d’efforts ?
Alex : 18 mois. J’en enregistré les premier vocaux à Berlin en janvier 2016. Ça en valait la peine car je suis fier du résultat. Forced Witness sonne humain. Il raconte une histoire qui évolue de façon cohérente.
Alex, tu continues à écrire sur un monde, souvent glauque, qui n’est pas le tien. Y a t-il une part de croisement entre l’imaginaire et le fantasme dans cette façon d’aborder tes paroles ?
Alex : J’essaie de dévoiler des facettes de la nature humaines sur lesquelles personne ne s’attarde. Je parle plus de part d’ombre que d’imaginaire. Tout ce que tu retrouves dans les textes existe dans la vie de tous les jours. Créer des histoires dramatiques est un exutoire.
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