[mks_dropcap style= »letter » size= »75″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]S[/mks_dropcap]aint- Jean-de-Luz, Stockholm, la Laponie, dans le nouveau roman d’Olivier Truc, le voyage est omniprésent.
Des voyages dangereux pour son héros Izko, jeune homme idéaliste et tourmenté.
Marqué par une figure paternelle imposante, Izko dont certains ont repéré l’intelligence et le talent, se voit confier une mission terriblement importante pour le royaume de France : faire l’espion et surveiller les hommes puissants de Suède.
Car la France a une alliance avec ce pays et ne souhaite pas la voir rompue.
Pour le motiver, les juges qui utilisent Izko au profit de Richelieu, lui disent que de sa réussite dépend de la survie de sa famille.
Le jeune Isko, à peine adolescent, quitte son monde, en 1628, pour partir se former avant de se lancer corps et âme dans sa mission.
Pour corser les choses, Izko a assisté, plus jeune, à une scène terrible qui ne cesse de le poursuivre.
Le naufrage d’un bateau flambant neuf duquel vont sortir un homme et sa compagne enceinte.
L’homme est assassiné sous les yeux d’Izko pendant que la femme accouche. Izko, courageux, sauve le nouveau-né sur le point de se noyer et le rend à sa mère. Celle-ci, sorte de sorcière, a un geste envers Izko : une malédiction ?
Le jeune homme, parallèlement à sa mission, voudra retrouver cette femme pour savoir ce qui s’est passé.
Olivier Truc mène les deux intrigues de front et nous progressons avec Izko sur de très nombreuses années, découvrant le sort réservé aux Lapons par les Suédois. Car ainsi que le dit l’auteur, dans la présentation de ses personnages :
avec qui la vie n’est pas toujours tendre. Mais l’époque était-elle tendre pour quiconque?
L’époque, 1628 pour le début du roman, 1693 pour la fin.
Effectivement, les guerres de religion font rage.
Les Lapons ont leur propres Dieux qui déplaisent fortement aux Suédois, mais ils adorent également Marie, et le catholicisme a fait son chemin chez eux, évangélisés par des prêtres venus les rencontrer en secret.
… ils ne sont pas des sauvages, mais pour certains déjà chrétiens, des chrétiens quoi ont gardé leurs déesses et leurs croyances, mais qui prient Marie comme ils prient Sarakka !? Qui se fichent de savoir quelle religion ils suivent tant qu’ils peuvent communiquer avec leurs morts et la nature.
Au fil des pages, le sort des Lapons, les exactions commises par les Suédois prennent de l’ampleur pour devenir le sujet principal du roman.
Nous entrons en communion avec ce peuple et Olivier Truc nous décrit ses coutumes, nous fait partager son quotidien, dans le froid et son courage admirable.
Izko prendra fait et cause pour ce peuple, rendant sa mission de plus en plus périlleuse.
Mais l’auteur n’épargne pas non plus la France et ses meneurs religieux, prompts à calomnier pour mieux brûler et dominer.
Une époque tendre…
On ressort éreinté de quelques passages tout droit venus du Moyen-Âge et de ses tortures. Peu y échappent.
Olivier Truc ne lésine pas sur les descriptions. C’est difficile à lire, souvent.
Mais l’intérêt prime et nous continuons, voulant absolument connaître la suite des aventures d’Izko et de ses amis lapons.
Un grand et long livre d’aventures, érudit et formidablement écrit dans ses descriptions d’un monde inconnu qui nous émeut beaucoup.
Comme si nous étions avec les personnages, en Laponie, dans le froid, au coin du feu, avec des rennes broutant le peu d’herbe restant sous la neige.
Un plaisir parfois effroyable, un déchirement de quitter Izko!
Le cartographe des Indes boréales d’Olivier Truc
éditions Métailié, mars 2019