[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#dd3333″]E[/mks_dropcap]xploration du flux de Marina Skalova se rapproche de deux textes d’auteurs différents, publiés précédemment. Il possède la même force que Frères Numains de Florence Pazzottu et Sidérer, Considérer de Marielle Macé, lequel a déjà fait l’objet d’un article ici.
Ces trois textes abordent, chacun à sa manière, la question du phénomène migratoire et éclairent le problème avec justesse et sensibilité. Marina Skalova livre un texte rempli d’une colère froide face aux mauvais traitements de ces flux migratoires par la « forteresse » occidentale.
Déroulant la notion et le champ lexical du flux, elle dénonce, parfois avec l’ironie du désespoir, le renoncement de cette affaire humaine au profit d’intérêts économiques. Par une observation étymologique, le texte semble puiser sa force dans la colère et surtout le désarroi face à la situation. Il y a quelque chose de magique dans cette énergie de l’auteure à mener, avec les seuls mots, un combat contre la malhonnêteté humaniste de l’Europe. On ressent à la lecture de ce texte la férocité de l’abattement qui peut tout arrêter.
« C’est désespérant, d’avoir affaire avec l’humanité ».
C’est ainsi que s’arrête un texte compact, qui s’est acharné malgré tout à l’être. Puis les pages se vident, ne laissant plus que des bribes de phrases. Marina Skavola avoue avoir arrêté l’écriture de ce texte face à « la colère [qui] s’est atténuée, / émoussée / en allemand abgestumpft / usée comme une mine de crayon ».
Pourtant le texte est là, ce texte devenu livre. Il s’est acharné contre la tempête et reste présent malgré l’aveu d’abandon. C’est par la lecture qu’il demeure et permet le réveil. Comme un appel lancé des tréfonds de l’abattement, dans la puissance des vagues, chacun pourra constater l’effort à faire pour reprendre contact avec l’humanité.