[dropcap]C[/dropcap]ette année encore, Estelle Durand et Claire Duvivier, aux manettes des excellentes éditions Asphalte, ont fait le choix d’une rentrée littéraire particulièrement resserrée puisque ce Villa Wexler sera leur seule proposition.
Choix courageux, choix militant, cette décision devrait ravir les libraires épuisés par une surproduction constante qui les oblige à raccourcir la durée de vie des romans exposés afin de libérer de la place pour les nouveautés. Quelques éditeurs ont choisi la même démarche et l’on prendra donc la peine de se pencher sur leurs titres respectifs (on pense en particulier au Tripode, à Agullo, La Manufacture de Livres ou encore Le Mot et le Reste).
Tel le fermier du Far West établi au pied d’une éminence, Wexler avait toujours l’air de redouter quelque chose. Il en fallait peu. La clochette d’un chien de chasse, le hennissement du cheval ou, très loin, à peine audible, la sirène d’un véhicule d’urgence. La sonnerie du téléphone crispait une seconde son visage. »Jean-François Dupont
S’il a déjà écrit une grosse dizaine d’ouvrages, c’est avec ce Villa Wexler que l’on découvre Jean-François Dupont, ex-enseignant de littérature et de cinéma, désormais auteur et voyageur à plein temps. Et l’on ne s’étonnera donc pas que le personnage qui donne son nom à la Villa et son titre au roman soit lui-même professeur de français et passionné de 7ème art au point de tourner un court-métrage avec ses élèves.
Mathias, le narrateur, revient sur cette période trouble vingt ans après les faits. Il était à l’époque amoureux de Charlotte, une des filles du professeur Wexler, ce qui lui permit une certaine proximité avec cette famille aussi étrange que soudée, dont nul ne savait avec certitude d’où elle venait. Contacté par les parents d’une ancienne élève de sa classe soignée dans un centre de repos, Mathias va revivre la série d’événements qui mirent fin à son adolescence et dont il ressent encore les secousses.
Si Jean-François Dupont s’est inspiré de sa propre expérience professionnelle pour imaginer celle du professeur Wexler, il y a en revanche fort à parier que là s’arrête toute ressemblance. C’est en effet autour de ce personnage charismatique et ambivalent que se construit l’intrigue de son roman. Homme mystérieux, conscient de l’influence qu’il peut imposer à de jeunes lycéens fascinés par son aura vénéneuse, Wexler jouera de son magnétisme et de son ascendant pour séduire Aurore, une de ses élèves, qui finira par quitter son foyer pour suivre la famille Wexler lorsque celle-ci quittera en catastrophe la ville.
Cinéphile averti, l’auteur cite deux films que Wexler projette à ses élèves afin de leur donner une idée de l’ambiance du court-métrage qu’il veut réaliser avec eux : Sa Majesté des mouches et Les chasses du comte Zaroff, deux œuvres marquantes qui peuvent aider à circonscrire cette Villa Wexler. Jean-François Dupont installe ici une atmosphère pesante au sein de laquelle se débattent les adolescents pendant que la figure de Wexler plane au-dessus d’eux, profitant de l’instabilité émotionnelle propre à leur âge pour les manipuler sans vergogne.
Roman de la fin de l’adolescence et d’une entrée brutale dans l’âge adulte, Villa Wexler livre le portrait convaincant d’un homme qui, même aux abois, n’a jamais cessé de vouloir rester maître d’un jeu dont il semble être le seul à connaître tous les tenants et aboutissants. Et ce ne sera sans doute pas un hasard si l’ombre de Xavier Dupont de Ligonnès semble parfois s’inviter à la lecture de ces pages, il pourrait en être une source d’inspiration particulièrement crédible…
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Villa Wexler de Jean-François Dupont
Asphalte éditions, 2 septembre 2021
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Image bandeau : Hasan Almasi / Unsplash