[dropcap]J[/dropcap]e me suis renseigné : « sviňa », en slovaque, signifie « porc ». Le titre français du nouveau livre choc d’Arpad Soltész devient Le Bal des porcs sans que ce passage de l’un à l’autre ne soit gênant, bien au contraire car ce long roman a tout d’une danse, danse macabre surtout.
Déjà avec Il était une fois dans l’Est, Arpad Soltész avait choqué, bouleversé et passionné les lecteurs.
Ce Bal des porcs reprend les mêmes recettes : violence, viols, drogue, mafia, argent sale, politiciens et juges corrompus, journalistes à la solde du pouvoir avec au milieu de tout cela, quelques journalistes intègres qui, forcément, finissent mal, trous creusés dans le sol, balles de silencieux, meurtres, jeunes filles placées arbitrairement en institution et devenant de la chair à prostitution pour les tout-puissants.
L’écœurement n’est jamais loin dans Le Bal des porcs. Un dégoût surtout ressenti face à ces hommes abusant de toutes jeunes filles en totale impunité. « #MeToo » est-il arrivé en Slovaquie ?
Mais quel intérêt a ce nouveau livre s’il ressemble au premier ? Le style ! La façon de raconter d’Arpad Soltész ! Déroutant, souvent – et en cela, il fait parfois penser au David Peace de GB84 – Soltész fait le pari de l’intelligence de son lecteur.
Sa narration n’est jamais la même selon les chapitres. Si bien que les découvrant au fur et à mesure, il nous faut faire un effort de concentration car parfois, un chapitre commence par sa fin et la fin « définitive » d’un des personnages. Soltész remonte alors le fil de l’histoire en revenant au début ou au milieu de ce pan du livre.
Oui, c’est déroutant, d’autant plus que le travail sur les noms des personnages, aussi drolatiques qu’ils sont absolument dégueulasses, nous fait nous perdre également. Quelques exemples : Marron, Yéti, Casse-Dalle (mon préféré), Faucheux et tant d’autres encore. C’est une lecture qui nous oblige à nous tenir prêts, en haleine, avec un crayon pour souligner certains passages et une feuille pour prendre des notes.
Lire Le Bal des porcs, c’est accepter de faire ces efforts, accepter aussi de voir certaines intrigues ne pas se terminer. Soltész a l’art de laisser des pans de son histoire en cours de route, les abandonnant pour nous en proposer d’autres.
La Slovaquie, ici, c’est le Far West. Tous des porcs, tous des salauds mais avec un code de l’honneur. La parole donnée vaut beaucoup. L’aide entre truands aussi. Le Far West ou la mafia. Un peu des deux. Et au milieu des truands, des hommes d’affaires, qui manipulent l’opinion, font élire un de leurs hommes de main président pour ensuite en profiter pendant quatre ans.
– Au pire, quelques documents ou quelques témoins vont se perdre, tout peut s’arranger. Mais ça commence à se voir un peu beaucoup et tu sais comment vont les choses – tous les quatre ans il faut être propre, sentir bon et lécher le cil de la populace.
Arpad Soltész
Petite lueur d’espoir, quelques journalistes, tel Ondro qui a une capacité d’analyse peu commune, celui qui voit dans les documents les magouilles que la plupart ne sont pas capables de trouver. Ce talent fera de lui une cible parfaite.
Et à la vue des événements qui se passent en Slovaquie actuellement, on peut déjà refermer la lueur d’espoir. Le procès du meurtrier du journaliste Jan Kuciak et de sa compagne ainsi que du commanditaire de cet assassinat vient de se refermer sur la relaxe de ce dernier, provoquant une onde de choc dans le pays.
Le Bal des porcs, c’est un jeu de domino, de dupes où tout peut s’effondrer un jour ou petit à petit, à force de mauvaises manœuvres.
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Le Bal des porcs d’Arpad Soltész
traduit du slovaque par Barbora Faure
Agullo Éditions, septembre 2020
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Image bandeau : 3D Animation Production Company // Pixabay