[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]C'[/mks_dropcap]est en écrivant que l’on produit de l’écriture. Le discours vide de Mario Levrero est le journal d’un auteur en quête de perfectionnement calligraphique. L’auteur note au fur et à mesure les évolutions de ses exercices rigoureux ou presque. Éternel insatisfait, Levrero ne cesse d’être perturbé par son entourage ou ses débordements. Mais c’est ainsi que naît tout l’intérêt du Discours vide, par son débordement, qui fait entrevoir les turpitudes d’un homme de la deuxième moitié du 20ème siècle vivant entre Montevideo, Colonia en Uruguay et Buenos Aires en Argentine.
L’homme travaillant son écriture manuscrite pourrait avoir l’allure d’un moine copiste. Le journal est le lieu du plus trivial des détails et y transparaît un homme hanté par ses rêves et son quotidien. On peut lire d’ailleurs à ce sujet de longues pages sur son chien qui le préoccupe au plus haut point. On découvre aussi un homme qui cherche la solitude au cœur d’une sociabilité établie. Le moindre bousculement comme un déménagement devient la plus grande épreuve.
Écrit en 1993, Le discours vide est rempli d’un humour burlesque, autocentré sur son narrateur qui est un brin misogyne et troublé par son psychisme. La lecture le rend pourtant sympathique tant il apparaît en bonhomme sans certitude et chérissant une paix intérieure dont chacun pourra éprouver le même désir. Les exercices calligraphiques, prétextes à une lamentation drolatique de ses troubles, deviennent en eux-mêmes une écriture de l’intime et de l’ego.
Le discours vide de Mario Levrero
Traduit par Robert Amutio, Paru le 4 octobre 2018 aux éditions Noir sur Blanc