[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]L[/mks_dropcap]’orgue revient décidément très à la mode dans la pop d’aujourd’hui. On est en droit toutefois de s’interroger sur la pertinence de l’usage du terme pop quand on évoque Anna Von Hausswolff ou encore les murmures organiques d’Angèle David-Guillou plus connue sous le nom de Klima. On l’a découverte avec le projet de son compagnon, Glen Johnson et Piano Magic. On est ici beaucoup plus proche de l’école estonienne et bien plus encore du Arvo Pärt de Miserere que de petites comptines pop.
Chez Angèle David-Guillou, il y a toujours une propension à la contemplation, à ce rapport ténu mais nécessaire à l’ennui. Ces cinq mouvements sont comme autant de respirations, insufflation puis expiration, cœur qui bat la chamade puis qui s’apaise. Avez-vous jamais entendu le calme et l’apaisement chez Julianna Barwick ou chez Stars Of The Lid ? C’est cela que vous retrouverez tout au long de Mouvements Organiques, des chants comme des vagues, l’absence de la présence d’une chaleur humaine, sa trace qui la rend d’autant plus présente.
On croit assister à un ciné concert, sur l’écran noir apparaît le visage diaphane de la Loulou de Pabst, les yeux brumeux de Louise Brooks, la pâleur du Nostalghia de Tarkovski, les terres glacées que traversent Shackleton à la recherche de lui-même.
Mouvements organiques portent bien son nom tant il se dégage de ces boucles qui se répondent une forme de dialogue avec le silence. D’Arvo Pärt, la Française a compris ce qui doit être retenu.
« Je pourrais comparer ma musique à une lumière blanche dans laquelle sont contenues toutes les lumières. Seul un prisme peut dissocier ces couleurs et les rendre visibles : ce prisme pourrait être l’esprit de l’auditeur ».
La musique d’Angèle David-Guillou, à l’image de celle de Adam Wiltzie et Brian Mcbride, peut sembler froide, systématique et presque mathématique mais elle se révèle au fur et à mesure que notre ennui s’installe. Cela peut paraître paradoxal mais l’ennui semble être le maître-mot de ce projet. Ennui qui n’a rien à voir ici avec lassitude mais plus avec une errance. Dans une société qui oublie les bienfaits de la déambulation intérieure, il faut dire haut et fort tout le bien que l’on pense de telle démarche, de celle que mène Angèle David-Guillou.
Laissons la place à ces musiques qui font table rase des scories et des parasites car derrière leur neutralité en faux-semblant, se planque la plus belle des expériences, l’émerveillement.
Merci beaucoup!