[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#f0cf4d »]L[/mks_dropcap]a Maison de Verre est le quatrième et dernier volet du Buru Quartet, œuvre monumentale de Pramoedya Ananta Toer. Mort en 2006, l’écrivain indonésien n’aura pas été honoré du prix Nobel.
Ce quatrième volet, traduit pour la première fois par Dominique Vitalyos, n’a pas besoin d’être lu avec en mémoire les livres précédents. Il inciterait plutôt à aller les (re)lire. À la fois à part et clé de voûte de la saga, La Maison de Verre est un livre de 560 pages où l’on s’immerge dans un état proche de l’hypnose.
Au début du XXème siècle, nous sommes dans la tête de Jacques Pangemanann qui envoie en exil Raden Mas Minke à Amboine. Sur cette petite île de l’archipel des Moluques en Indonésie, le dissident est ainsi désarmé de son pouvoir. Au service du régime colonial, Pangemanann vénère et respecte pourtant cet homme, figure héroïque absolue. Attaché ensuite à une administration gouvernementale en tant qu’expert aux questions indigènes, l’étant lui-même, il doit surveiller les activités dissidentes et tous ceux qui se placent dans la lignée de Minke. Ces nationalistes sont dans sa « maison de verre » qu’il scrute minutieusement.
Dans la tête du narrateur, le lecteur vit le paradoxe d’avoir de l’admiration pour les personnes surveillées. Pramoedya Ananta Toer réussit à tisser une fiction dense et étourdissante. La langue de l’auteur est parfois aride, mais cela n’empêche pas le maillage fictionnel d’être captivant. C’est à travers celui-ci que l’on découvre l’histoire d’un pays. Pramoedya Ananta Toer appelé familièrement Pram montre comment les opprimés indonésiens de la colonisation néerlandaise prennent conscience de leurs forces.
Il n’est pas fréquent de découvrir l’histoire d’un pays à travers le regard de l’un de ses citoyens aussi engagé que l’était Pram. Il fut interné à plusieurs reprises, et surtout de 1965 à 1979 au bagne de Buru où il conçoit son quartet avec le personnage Raden Mas Minke. Ce livre est une œuvre qui a une véritable importance littéraire et historique. Elle montre que la puissance de la fiction permet de construire le récit du monde. La Maison de Verre incite le lecteur à tourner sa curiosité vers l’histoire de l’Indonésie.