[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]T[/mks_dropcap]u ouvres les yeux tu vois le titre est tout d’abord formellement un bel ouvrage, conçu par Matthieu Becker. Le livre apparait comme une gravure dont le bleu vient renforcer l’aspect onirique que le titre laisse présager. Pareil à un rêve éveillé, nous débutons la lecture de ce texte et se dévoile toute l’inventivité de la langue d’Arno Calleja.
Se déploient alors sept chapitres et donc sept histoires où des êtres sont confrontés à un élément ou un événement qui va les mettre en action. Chaque histoire a une part d’irréalité qui ne surprend qu’à peine. Elles se relient entre elles par des récurrences, par exemple un film d’Eustache que l’on va voir, un peintre mais également la mort qui frappe pour qu’ensuite les personnages se métamorphosent. Que ce soit des enfants, des hommes ou des femmes, chacun accomplit une action qui va les bouleverser et nous conduire avec eux dans un cheminement plus ou mieux sinueux.
Arno Calleja écrit tel un peintre qui reproduirait une scène sans y ajouter de fioritures. Dans la notice biographique, il est dit que l’auteur s’est tatoué sur le bras « je déteste les adjectifs ». Vrai ou pas, ça dit quelque chose de son style, sans excès si ce n’est avec la liberté où le mène la phrase. Vous n’y trouverez pas de métaphores ou de figures stylistiques ampoulées que l’on retrouve dans la littérature paresseuse que dénonce Eric Chevillard dans son livre paru à la rentrée.
Pourtant la puissance imaginaire de la phrase d’Arno Calleja apporte une émotion similaire à celle que l’on peut ressentir par le vécu. Ce livre est un rêve éveillé, répétons-le, qui nous laisse dans les bras de cette écriture en mouvements incessants. Nous berçant et nous bousculant tout à la fois, ceux-ci incarnent le fruit d’une écriture qui repense la littérature. Arno Calleja crée avec Tu ouvres les yeux tu vois le titre une forme hybride puisant dans l’originalité de l’écriture poétique autant que dans la fiction. Pas besoin de lui trouver un nom, il suffit d’ouvrir les yeux pour en voir l’énergie.