[mks_dropcap style= »letter » size= »52″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]D[/mks_dropcap]ois-je vous faire l’affront de présenter Tinariwen, groupe Touareg formé d’exilés maliens et auteur d’une discographie quasi sans-failles, creusant inlassablement le même sillon ? Probablement pas.
Le groupe sort actuellement son premier live sous forme physique (son Live At Bouffes Du Nord était sorti via le Guardian en téléchargement libre) et autant le dire sans prendre de gants : on envie sérieusement les spectateurs présents dans la salle des Bouffes Du Nord ce 13 décembre 2014. Et ce pour différentes raisons : d’un parce que ce concert était le dernier d’une tournée de 130 dates, donc avec un groupe maîtrisant son répertoire sur le bout des médiators ; et de deux (et quel deux !!), le groupe reçoit en guest Lalla Badi, figure tutélaire du Tindé (petit tambour exclusivement joué par les femmes au Mali) et poétesse renommée. Comme eux Badi (Lalla, pas Chimène) mais avec quelques années d’avance, fait de la musique un instrument politique, s’engage auprès des ishumars. C’est d’ailleurs elle qui accueille les Tinariwen quand ils fuient le Mali, elle qui entend leurs premières démos. Quoi de plus normal alors que l’accueillir pour célébrer la dernière date de la tournée d’Emmaar. L’accueil se fera donc aux Bouffes Du Nord, pour un concert qu’on peut qualifier d’excellent.
[mks_dropcap style= »letter » size= »52″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]L[/mks_dropcap]e public se retrouve donc à la tombée de la nuit, au coin du feu, salué par des chœurs masculins, quelques youyous puis la voix puissante de Badi. Le groupe se range derrière sa poésie, met son blues de côté pour sept minutes de transe hypnotique traditionnelle et reprend ensuite guitares, basses, percussions pour dérouler son répertoire Tishoumaren en nous gratifiant de deux inédits. Un Azawad lorgnant de plus en plus vers le blues d’Ali Farka Touré et un Emin Assosam sur l’os, intime et presque chuchoté. Le reste, c’est du Tinariwen de haut vol (comme d’habitude serait-on tenté de dire), imperturbable, soit un blues hypnotique, tendu et qui , à mesure que le concert avance, semble se libérer sous l’effet du Khat ou autres substances plus ou moins hallucinogènes. En résulte un concert qui, outre une pause Tindé traditionnelle en son milieu, monte doucement en puissance, prend des allures de fête (ou de meeting politique, c’est selon le point de vue) jusqu’à ce que tradition et modernité cohabitent dans un final où Badi renvoie l’ascenseur, se met au diapason du groupe pour ne plus faire qu’un et signer le morceau le plus captivant du set.
[mks_dropcap style= »letter » size= »52″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#000000″]B[/mks_dropcap]ref, même en live, catégorie qui a tendance à me gonfler car présentant peu d’intérêt, ils parviennent à être passionnant (faut dire aussi que leur musique se prête avantageusement à ce genre). Après, vu dans des conditions adéquates (dans le désert, autour d’un feu sous la voûte étoilée), c’eut été encore meilleur. Mais bon, ne boudons pas notre plaisir et apprécions ce disque à sa juste mesure, c’est à dire comme un live qui, une fois posé sur la platine, réchauffera votre foyer et vous permettra de voyager à peu de frais. Ce qui, en ces temps de disette et de frimas tardifs, est déjà beaucoup.
Sorti depuis le 20 novembre chez Wedge/PIAS et dispo chez toutes les agences de voyage disposant d’un disquaire et réciproquement.