Après avoir signé plusieurs biographies, Frédéric Rébéna s’attaque à un monument de la littérature française en adaptant Bonjour tristesse (Rue de Sèvres), le premier roman de Françoise Sagan. Un exercice plutôt réussi, qui projette l’image d’un affrontement sensuel et tragique entre des protagonistes séducteurs et manipulateurs.
[mks_dropcap style= »letter » size= »85″ bg_color= »#ffffff » txt_color= »#205BA4″]L[/mks_dropcap]a fin est connue dès le début, avec de premières planches mettant aux prises la jeune mais pas moins candide Cécile et la très élégante, froide et intelligente Anne. Pour autant, le récit qui se met en place ensuite intrigue et captive.
Cécile vient de rater son bac et devrait réviser mais n’a qu’une idée en tête : se détendre, fumer, se prélasser au soleil. Elle entend aussi ne pas rompre le charme de vacances passées avec un père qu’elle a plaisir à retrouver et auquel elle voue une admiration sans nom.
Alors bien sûr, il y a dans la villa estivale la présence de sa maîtresse à lui, la très jeune et aguicheuse Elsa. Mais Cécile la considère comme un jouet passager, sans grand danger pour sa relation fusionnelle avec son père.
C’est dans ce jeu de quilles fragile que débarque Anne, qui fut la meilleure amie de la mère de Cécile, disparue il y a 15 ans. Splendide, sa maturité pourrait offrir à son père des lendemains qui chantent moins futiles et plus stables. Tout ce que la jeune femme exècre, qui refuse d’être mise dans une case et, surtout, de voir son père s’installer et lui échapper durablement : « Anne était un beau serpent, elle se glissait entre nous. Elle allait voler notre bonne chaleur« .
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Un stratagème se met en place alors avec l’aide de Cyril, étudiant en droit. Les conséquences en seront tragiques et conduiront Cécile a beaucoup pleurer, avant d’oublier progressivement ce qui vient de se passer pour, de nouveau, jouer les dilettantes.
Amoral à souhait, Bonjour tristesse agit comme un révélateur de fractures entre générations et se veut le reflet d’une société libre et frivole. La bande-dessinée retrace bien la magie de cet état d’esprit. Le jeu des couleurs et la simplicité graphique du trait y participent largement.
Petit regret : comme si tout était écrit d’avance, les dialogues s’enchaînent de manière très mécanique, nous plaçant parfois comme un spectateur contemplatif, voire distant des marivaudages ou liaisons dangereuses qui se jouent sous nos yeux. Il n’en demeure pas moins, comme le souligne Frédéric Beigbeder dans la préface, que cette bande-dessinée réveille le texte original et a le mérite de lui conférer une nouvelle jeunesse.